MAZZINI GIUSEPPE (1805-1872)
L'une des grandes figures du xixe siècle politique et social. Originaire de Gênes où la Révolution française avait semé les germes du jacobinisme et fait de la cité ligure « le grand volcan de la liberté italienne » (G. Asproni), Mazzini fut moins marqué par son père Giacomo, professeur à la faculté de médecine, que par sa mère, Maria Drago, femme d'une profonde religiosité et d'un esprit ouvert et compréhensif. D'une intelligence précoce, il acquiert une vaste culture humaniste et juridique et, en 1827, se joint à la secte des carbonari. Emprisonné, le 13 novembre 1830, et placé devant le choix entre l'internement ou la proscription, il part pour Marseille. C'est le début d'une période d'exil qui va, pratiquement, durer quarante années. Dans sa prison de Savone, il élabore ses conceptions, dont il ne variera plus.
La pensée de Mazzini est fondée sur quelques idées simples. Elle allie au libéralisme, de dérivation jacobine, la religiosité et le principe d'universalité exprimé dans la formule « Dieu et le Peuple ». Mazzini se sépare des autres réformateurs, qui échafaudent des modèles de société idéale, destinés à se substituer au régime politique et social existant, en ce qu'il croit que les hommes de son temps ne doivent pas créer un monde nouveau, mais continuer et améliorer celui qui existe. L'humanité n'est pas, comme l'affirmaient les penseurs du xviiie siècle, un cosmopolitisme fractionné en individus, qui revendiquent leurs droits avant d'assumer leurs devoirs, mais un tout, voulu par Dieu, unissant les peuples dans la conscience d'une origine et d'un devenir communs.Cette attitude postule le rejet radical de l'utilitarisme et du matérialisme. Le passage des individus à la prise de conscience éthique s'opère à travers la religion, synthèse de l'éducation morale. La violence ne doit pas imposer un ordre tyrannique, mais elle est le moyen de rompre le système absolutiste. C'est le peuple qui se libérera des monarchies et du joug étranger, car la liberté n'est que l'autonomie du sujet politique responsable. La république est la seule forme de gouvernement à la fois légitime et logique, compatible avec la morale et la nationalité, signe d'identité et universalité des citoyens parlant la même langue. L'humanité est appelée à se restructurer dans un système fédéraliste de nations unitaires. L'expansion coloniale est légitime, si elle est entendue comme la volonté d'apporter un progrès civique et matériel aux peuples sous-développés. Pour Mazzini, le social est indissociable du politique. Il se livre à une analyse du rôle de la propriété et conclut que, dans l'Europe bourgeoise de son temps, elle confère à ses détenteurs le pouvoir d'opprimer et de gouverner. Mais, à la différence des socialistes, Mazzini pense que la propriété privée représente l'homme dans ses relations avec le monde matériel. Il convient donc, non pas de l'abolir, mais au contraire de la rendre accessible au plus grand nombre. La solution de la question sociale ne réside pas dans la lutte des classes, mais dans leur association fraternelle, dans l'union du capital et du travail.
Réfugié à Marseille (févr. 1831), Mazzini y organise la Giovine Italia (la Jeune Italie) qui supplante peu à peu le carbonarisme ; mais les « fédérés », membres de cette nouvelle association, échouent dans une tentative de soulèvement en divers points de la Péninsule (1833). Condamné à mort par contumace, le patriote génois se réfugie en Suisse où, surveillé par la police, il mène, dans divers cantons, une vie errante (1833-1837). Il élargit son dessein en fondant la Giovine Europa et ses sections, la Jeune Allemagne et la Jeune Suisse (1835), qui recrutent quelques adhérents parmi les républicains avancés.[...]
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Écrit par
- Paul GUICHONNET : professeur honoraire à l'université de Genève
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