GLACE
L'homme a connu et baptisé la forme solide de l' eau depuis les temps les plus reculés, ce qui nous vaut des noms très différents selon les langues : glace, ghiaccio, hielo... dans les langues latines ; is, Eis, ice... dans les langues germaniques ; led, lod... dans les langues slaves. Si cette découverte avait été le fait des naturalistes, nous n'utiliserions que deux mots universels, l'un pour désigner le minéral glace, l'autre pour désigner la roche glace – roche formée quasi exclusivement par un assemblage de cristaux, aux formes non régulières ni géométriques, du minéral glace –, de même que l'on emploie les vocables quartz pour le minéral, et quartzite pour la roche formée de quartz.
Le minéral glace peut prendre dix formes cristallines, dont une seule, la glace Ih, se forme naturellement sur la Terre. La symétrie hexagonale du réseau cristallin de cette variété est évidente lorsqu'on examine un cristal de neige, formé dans l'atmosphère à partir de la vapeur d'eau. La propriété la plus remarquable de la glace Ih, et la plus importante du point de vue écologique, est d'être moins dense que le liquide correspondant (l'eau), à la différence des autres corps. Sous des pressions supérieures à 200 mégapascals se forment des glaces « normales », c'est-à-dire plus denses que l'eau sous la même pression, baptisées glace II à glace IX. Sous de faibles pressions, mais à la température de l'hydrogène liquide, on peut obtenir une glace Ic, cubique, et aussi, par trempe de gouttelettes microscopiques d'eau, de la glace amorphe, non cristallisée.
La glace est, avec l'olivine (silicate de magnésium et de fer), le minéral le plus répandu dans le système solaire. Il doit former une grande partie d'Europe et la presque totalité de Ganymède et de Callisto (satellites de Jupiter), les anneaux et la plupart des satellites de Saturne, d'Uranus et de Neptune ainsi que les noyaux des comètes. On doit trouver de la glace II, V et VII au sein de Ganymède et de Callisto, et de la glace amorphe dans les comètes, cette glace devenant cubique lorsque la comète s'approche du Soleil. Les calottes polaires de Mars sont formées de neige, mais elles sont recouvertes pendant l'hiver par 6 centimètres de neige carbonique.
La roche glace est une glace polycristalline pratiquement imperméable à l'eau, ce qui exclut la neige, le névé et le givre. Elle peut être extrêmement variée selon son origine et les métamorphoses qu'elle a subies, principalement du fait de sa déformation. On s'en aperçoit en étudiant sa texture (taille, forme et agencement des grains, c'est-à-dire des cristaux individuels), sa fabrique (orientation statistique des axes de symétrie hexagonale), sa teneur en inclusions gazeuses (bulles d'air) et liquides (gouttelettes d'eau plus ou moins salée dans les glaces au point de fusion, dites glaces tempérées). On peut distinguer :
– la glace polycristalline provenant de la congélation des gouttelettes d'eau au sein d'un nuage (grêlons) ;
– les glaces provenant de la congélation d'eau en masse (glaces de rivière, de lac, de mer ; glace artificielle) ;
– les glaces provenant de la congélation de l'eau au fur et à mesure qu'elle sort du sol ou suinte sur les rochers (verglas et stalactites de glace, tarines – champs de glace à l'aval des sources, se formant chaque hiver –, glacières permanentes se formant naturellement dans certaines cavernes) ;
– la glace se formant dans les sols gelés ;
– la glace de glacier, provenant de la neige déposée, parfois par fonte suivie de regel, mais le plus souvent directement, par frittage.
La glace est aujourd'hui le solide cristallisé dont les lois de déformation sont le mieux connues, dans toute leur complexité. Ces lois varient[...]
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Écrit par
- Louis LLIBOUTRY : professeur à l'université de Grenoble-I, directeur du laboratoire de glaciologie et géophysique de l'environnement du C.N.R.S., président du Comité scientifique et technique de l'Association nationale de l'étude de la neige et des avalanches
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