GLACE
Pétrographie des glaces de congélation
Congélation de l'eau douce
La congélation implique que les calories libérées soient évacuées, autrement dit que des frigories parviennent à l'interface eau-glace depuis un lieu plus froid. Si de l'eau douce est contenue dans un récipient refroidi, il se forme au départ de la glace contre les parois, avec des axes optiques perpendiculaires à la paroi. Si le froid vient du haut, la glace se forme à la surface libre, avec les axes optiques verticaux.
Mais en général la température de l'eau commence par s'abaisser en dessous du point de fusion. Lorsque cette surfusion cesse, ce qui se produit brusquement de façon irréversible, l'eau renferme un stock de frigories utilisable pour la congélation, et cela peut modifier la texture et la fabrique de la première glace formée. Ainsi de la pluie surfondue tombant sur une roche à température légèrement positive donne un verglas avec des axes optiques parallèles à la paroi. À la surface libre, l'eau surfondue congèle en formant de longues aiguilles, avec une orientation des axes optiques quelconque.
L'arrêt de la surfusion se produit autour de germes de congélation, poussières microscopiques qui sont actives à des températures plus ou moins basses. Dans les gouttelettes de certains nuages, l'absence de germes de congélation explique des surfusions intenses, pouvant s'approcher de − 40 0C. Au-delà survient toujours une congélation spontanée, dite homogène (cf. précipitations [météorologie]).
Bulles d'air autogènes
Après cette première phase, la congélation doit forcément se poursuivre grâce à un apport de frigories à travers la glace. Les sels et l'air dissous dans l'eau ne peuvent s'incorporer au réseau cristallin. Il apparaît donc des bulles d'air à l'interface glace-eau une fois la saturation de l'eau en air dépassée. L'eau saturée d'air à 0 0C et sous 1 atm renferme 2,85 p. 100 de son volume d'air (celui-ci étant mesuré sous les conditions normales).
Cela explique qu'au cœur des barreaux et cubes de glace artificielle qui a congelé en dernier, on trouve une glace très bulleuse. La composition de ces bulles n'est pas celle de l'air atmosphérique, mais celle de l'air dissous dans l'eau (34,9 p. 100 d'oxygène au lieu de 20,9 p. 100 ; 1,3 p. 100 de gaz carbonique au lieu de 0,03 p. 100).
Ces bulles d'air de la glace de congélation sont dites autogènes, par opposition aux bulles xénogènes de la glace de glacier ; lesquelles, provenant de l'air emprisonné dans le névé, ont la même composition que l'air atmosphérique. Les bulles autogènes ont le plus souvent une forme allongée, renflée à un bout et effilée à l'autre. Elles peuvent être à la limite de trois cristaux (bulles interseptales) ou, plus rarement, à la suite d'une congélation rapide, intracristallines.
Glace de rivière et de lac
Dans un lac qui se refroidit, la surfusion cesse à partir des bords et de cristaux de neige tombant à la surface. Une fois la surface couverte d'une pellicule de glace, les cristaux croissent vers le bas. Ceux qui ont leur axe optique vertical étouffent progressivement leurs voisins. Il se forme ainsi une belle glace sans bulles et à gros cristaux columnaires, allongés dans le sens vertical.
Des vagues ou du courant peuvent morceler la glace, puis la cimenter en un conglomérat. Une chute de neige peut la faire s'enfoncer. L'eau liquide du lac, protégée du froid par la neige, vient alors former un marécage sur la glace, avant de regeler en une masse très bulleuse, à petits cristaux. La texture finale d'une couverture de glace de lac est donc éminemment variable selon les lieux et selon les années.
Dans les rivières turbulentes, la cessation de la surfusion et la formation de cristaux de glace[...]
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Écrit par
- Louis LLIBOUTRY : professeur à l'université de Grenoble-I, directeur du laboratoire de glaciologie et géophysique de l'environnement du C.N.R.S., président du Comité scientifique et technique de l'Association nationale de l'étude de la neige et des avalanches
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