GLACIERS
Écoulement et érosion glaciaire
Cinématique du mouvement
Si on met de côté une couche superficielle crevassée et faillée, il semble que l'écoulement d'un glacier soit généralement extrêmement régulier, sans à-coups brusques. Toutefois, par exemple, au glacier d'Argentière, dans de grands décollements entre glace et rocher, sur 10 à 30 mètres, en aval d'un « verrou » (exhaussement du lit barrant transversalement la vallée), cavités accessibles grâce à des galeries creusées dans le rocher pour capter le torrent sous-glaciaire, on a indubitablement mesuré des mouvements par à-coups de l'ordre de 2 centimètres, séparés par plusieurs heures d'immobilité.
Les trajectoires des particules de glace forment donc un faisceau de courbes grossièrement parallèles, qui ne s'emmêlent pas (écoulement laminaire).
Vu l'imprécision des mesures de bilan et d'épaisseur, on peut négliger la compressibilité de la glace, même bulleuse. On transposera seulement dans les calculs la couche de neige et de névé en couche de glace de même poids. Il y a donc conservation du volume, et l'on peut écrire, les bilans étant mesurés en mètres de glace :
1o exhaussement de la surface du glacier en un lieu géographique fixe = bilan en ce lieu + vitesse verticale, vers le haut, de la glace. En état de régime, la surface est fixe et le bilan égale la vitesse verticale vers le bas. Les trajectoires s'enfoncent en zone d'accumulation et émergent en zone d'ablation. Il en va de même pour les cailloux tombés sur le glacier et formant des moraines latérales puis, si deux glaciers se réunissent, une moraine médiane.
2o augmentation du débit de glace entre deux sections transversales = bilan cumulé sur toute la surface entre ces deux sections ? augmentation de volume du glacier entre ces deux sections fixes. En état de régime, le débit croît vers l'aval en zone d'accumulation, est maximal à la ligne d'équilibre et diminue ensuite, jusqu'à s'annuler au front si le glacier se termine par une rampe sur la terre ferme. Dans un grand glacier des Alpes, ce débit maximal est de l'ordre de 10 hectomètres cubes de glace par an. On peut l'évaluer en cumulant les bilans depuis le front (et, si le glacier a varié de volume, en effectuant la correction correspondante).
On peut aussi évaluer le débit à travers une section transversale à partir des vitesses horizontales et de l'aire de cette section. L'épaisseur d'un glacier local se détermine par sismique-réflexion et, avec plus de certitude, par des forages (la glace est fondue avec une résistance électrique ou un jet d'eau chaude sous pression). Pour déterminer la vitesse de balises en surface, on relève des points géodésiques locaux, installés autour du glacier. Mais on ignore les vitesses en profondeur. Souvent elles ne diminuent fortement que dans une couche limite basale, et des calculs approchés grossiers donnent une précision suffisante (suffisante par exemple pour déterminer le bilan moyen dans un cirque d'alimentation avalancheux, où des mesures directes seraient impossibles). Ces calculs introduisent les forces en jeu et ne relèvent plus de la cinématique mais de la dynamique.
Dynamique de l'écoulement
L'écoulement d'un glacier est principalement dû à son poids et dépend aussi du fait que la surface libre n'est pas horizontale. Sauf sur de courtes distances vis-à-vis de l'épaisseur, la pente de la surface est toujours vers l'aval. L'écoulement se traduit globalement par une perte d'énergie newtonienne (qui se dissipe en chaleur), même si les couches basales doivent remonter une contre-pente, en sortant d'un surcreusement de la vallée.
Les forces d'inertie qui résultent des variations de vitesse sont absolument négligeables. La composante vers l'aval du[...]
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Écrit par
- François ARBEY : chargé de cours à l'université de Paris-XI
- Louis LLIBOUTRY : professeur à l'université de Grenoble-I, directeur du laboratoire de glaciologie et géophysique de l'environnement du C.N.R.S., président du Comité scientifique et technique de l'Association nationale de l'étude de la neige et des avalanches
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