GLISSEMENTS DE TERRAIN
La stabilité de toute pente est menacée par la pesanteur. Entre la déformation imperceptible de certains versants et la chute incessante des blocs dans les couloirs de la haute montagne, les glissements de terrain couvrent une large catégorie de mouvements le long des pentes. Ils sont fréquents et constituent un risque permanent dans presque toutes les régions du monde. En France, où de nombreuses communes sont menacées, c'est le deuxième risque naturel après les inondations. Leur étude et leur surveillance, qui doivent permettre la prévision de leur déclenchement, sont devenues une priorité en matière de catastrophes naturelles.
Le processus physique
Les modalités des déformations et des déplacements le long des pentes, et parfois loin au-delà de leur pied, sont très diverses ; aussi préfère-t-on utiliser l'expression plus générale de mouvements de terrain. Celle-ci inclut les coulées de boue le long des vallées, mais pas le transport dans les eaux courantes de débris rocheux finement divisés. Elle couvre aussi les affaissements, dus au comblement de vides souterrains, dont nous ne parlerons pas ici.
Au sens strict, le glissement de terrain est un phénomène localisé (fig. 1), qui produit des changements visibles le long des pentes : au sommet, on observe des surfaces d'arrachement, à forte pente et sans végétation, et, plus bas, des boursouflures irrégulières, des crevasses, des marches d'escalier, souvent avec des contre-pentes, des mares et des arbres inclinés vers l'amont. Le phénomène, une fois déclenché, n'est pas sans analogie avec l'écoulement d'un glacier ; on peut constater des vitesses plus faibles que le millimètre par jour, et des accélérations locales de l'ordre de plusieurs décamètres par jour ou davantage.
L'équilibre de toute pente, naturelle ou artificielle, obéit aux mêmes lois que celui des barrages : en l'absence d'eau, seul le frottement entre les grains ou blocs s'oppose à la pesanteur, quelle que soit l'échelle ; la cohésion est menacée par la durée, et son effet est limité par l'échelle (suivant le théorème de Galilée sur l'impossibilité des géants). En présence d'eau, des forces supplémentaires s'ajoutent. Le liquide diminue le poids des matériaux, donc le frottement (c'est la « sous-pression » sous les barrages poids), et « pousse au vide », puisqu'il s'écoule de l'intérieur vers l'extérieur. Ses effets sont aggravés dans les creux du relief où la nappe est plus haute et l'écoulement convergent, dans les terrains anisotropes lorsque la perméabilité horizontale est la plus faible et en cas de remplissage rapide des interstices ou des fractures (rapide s'entend par rapport à la conductivité du terrain : on remplace ici la baignoire qui déborde par le « crève-tonneau » de Pascal). De même que l'eau souterraine est considérée comme le principal ennemi des mineurs, elle est le principal facteur de déséquilibre des versants. Et comme ses effets sont d'autant plus redoutables qu'elle est moins visible, on a pu parodier Freud en disant qu'elle est la libido du terrain.
La classification des mouvements de terrain est malaisée en raison de la très grande variété des phénomènes et de leur juxtaposition et/ou superposition, tant dans l'espace que dans le temps (déformations continues ou discontinues, ruptures progressives ou brutales, d'abord localisées, puis plus étendues, liquéfaction, etc.). On peut se contenter de distinguer quatre comportements de base : la chute ou l'écroulement, le glissement, l'écoulement et le fluage (tableau et fig. 2). Les trois premiers sont des processus d'érosion bien visibles, « par sauts », qui tranchent sur les processus classiques « grain à grain ». Il n'est pas toujours facile de choisir entre ces comportements ni de déterminer quand[...]
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Écrit par
- Pierre DUFFAUT : ingénieur civil des Mines, expert en génie géologique
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