GLOZEL, site archéologique
Le 1er mars 1924, un jeune paysan du Bourbonnais, Émile Fradin, mettait au jour en labourant près du hameau de Glozel (commune de Ferrières-sur-Sichon, Allier) une sorte de fosse garnie de pierres puis, en creusant à proximité pendant plusieurs semaines, une collection d'objets archéologiques. Le site semblait démontrer que l'écriture avait été inventée en France il y a 15000 ans, au temps des chasseurs de rennes. L'affaire de Glozel était née, qui pendant sept années fit régulièrement la une des journaux et vit s'affronter plusieurs sommités scientifiques, avant de rebondir à nouveau dans les années 1970-1980, pour devenir une sorte d'archétype des affaires parascientifiques.
Une écriture vieille de 15000 ans
Émile Fradin, bientôt aidé par un médecin de Vichy, le docteur Morlet, et par un instituteur, Benoît Clément, mit au jour environ 3000 objets, que l'on peut voir à Glozel dans un petit musée privé. Une partie de ces objets évoquent l'époque paléolithique, il y a 15000 ans : galets gravés représentant des rennes, harpons, statuettes en os. D'autres relèvent plutôt du Néolithique, il y a environ 6000 ans : haches grossièrement polies, poteries parfois décorées d'un visage, figurines en argile, représentations de sexes masculins et féminins. Enfin un certain nombre de grandes tablettes d'argile sont gravées de signes d'une écriture inconnue mais qui évoque fortement les premiers alphabets phéniciens et certains signes ibériques, datés entre le viie et le ier siècle avant notre ère ; ces mêmes signes, associés parfois à des rennes, peuvent également être gravés sur des objets d'« allure préhistorique » : galets, outils en os, bracelets.
L'affaire fit grand bruit. Accepté sans discussions, le site de Glozel démontrerait que l'écriture, sous une forme très proche de celle qu'elle prendra 10000 ans plus tard, aurait été inventée par des populations de chasseurs paléolithiques en Europe occidentale, chasseurs qui auraient en outre pratiqué la poterie connue seulement au Néolithique. Le directeur du musée des Antiquités nationales, Salomon Reinach, soutint immédiatement Glozel : il dénonçait depuis longtemps le « mirage oriental », cette tendance à situer au Proche-Orient toutes les grandes inventions de l'humanité.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Jean-Paul DEMOULE : professeur émérite à l'université Paris-I-Panthéon-Sorbonne et à l'Institut universitaire de France
Classification
Autres références
-
ARCHÉOLOGIE (Archéologie et société) - Archéologie et enjeux de société
- Écrit par Jean-Paul DEMOULE
- 4 676 mots
- 2 médias
Les insuffisances de la diffusion de l'archéologie auprès du public favorisent également certaines croyances irrationnelles, que des médias en quête de sensationnel n'hésitent pas à répercuter. On voit ressurgir régulièrement le site de Glozel, « découvert » dans l'Allier en 1924, et qui présente tous...