GLYPTIQUE
Que les gemmes aient été muettes, inscrites ou gravées, dès leur origine, depuis les temps préhistoriques, elles précisèrent trois caractères distinctifs : ceux d'ornement, de talisman et de cachet.
Avant même qu'ait été connu le moyen de graver les pierres, elles étaient à elles seules des phylactères. Quand les graveurs les revêtirent d'images divines, ou même d'inscriptions qui étaient des prières, elles devinrent des talismans investis de pouvoir de protection. Étant à la fois protecteur et défenseur de celui qui le portait, le talisman s'identifiait à sa personnalité ; témoin de ses pensées, de ses engagements, de ses actes, il prit tout naturellement valeur de sceau, de cachet. Ainsi la pierre gravée devint-elle d'un usage courant pour sceller les actes et les contrats.
L'art de graver les pierres fines, en relief ou en creux, s'appelle la glyptique. Les Grecs, pourtant, donnaient du mot « glyptique » une définition moins restrictive : pour eux le terme de γλυϕή désignait non seulement la gravure sur pierres fines, mais encore l'art de ciseler le métal et le bois. Par contre, ils faisaient une distinction précise, quelle qu'ait été la matière utilisée par l'artiste, entre la gravure en relief appelée ἀναγλυϕή (anaglyptique), et celle en creux, appelée διαγλυϕή (diaglyptique). De la même manière, les Grecs faisaient une différence entre le graveur de gemmes, le λιθογλύϕος, et le lapidaire, le λιθουργός qui taillait et polissait les gemmes, et le joaillier chargé de les monter et de les enchâsser. Il faut cependant noter que dans l'Antiquité, comme à la Renaissance, un même artiste pouvait être, dans certains cas, lapidaire, lithoglyphe et joaillier.
Pour l'étude des matières et des techniques de taille, ainsi que pour les illustrations, on se reportera à l'articlegemmes.
Les pierres gravées dans l'Antiquité
L'Égypte
Les Égyptiens ont gravé d'innombrables pierres fines, en ronde bosse, et en creux, depuis la plus haute époque. Cette glyptique était l'expression figurée de leurs croyances ; elle représentait des têtes de lions, de chats, d'ibis, d'aigles, de cynocéphales ; des images de divinités telles que Ptah, Anubis, Harpocrate (Horus enfant), Horus, Nephthys, Isis ; des symboles comme la croix ansée, le lotus, l'œil mystique ; des cœurs, des doigts, des équerres, des chevets, des âmes à visage humain. Toutes ces amulettes étaient gravées sur cornaline, améthyste, émeraude, hématite, turquoise, lapis-lazuli ou feldspath. Mais l'emblème le plus répandu était le scarabée.
Habiles lithoglyphes, les Égyptiens ne surent pourtant jamais tirer parti des couches diversement colorées des agates ; ils se contentèrent de graver avec une extrême dextérité les pierres fines monochromes, et les surfaces planes des revers de scarabées où figuraient en creux des scènes religieuses ou guerrières, les noms de leurs destinataires ou des formules magiques consacrées.
Les civilisations du bassin mésopotamien
Les civilisations antiques du bassin mésopotamien taillèrent, dès le Ve millénaire avant J.-C., les premiers cachets et les premiers cylindres-sceaux.
Les gemmes primitives des Sumériens avaient des formes diverses, sphériques ou fusiformes, tels des cailloux roulés. Les formes cylindriques et conoïdes n'apparurent que quand la glyptique atteignit à sa perfection.
Les plus anciens cachets étaient ornés de sujets, de motifs stylisés : croissants lunaires, animaux schématisés, oiseaux, poissons. Ces premiers essais étaient gravés sur des roches tendres, calcaire, stéatite ou serpentine, creusées facilement par des outils en pierre. Après quelques cylindres gravés maladroitement, on voit apparaître la série des cylindres gravés sur les quartz les plus résistants où des[...]
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Écrit par
- Mathilde AVISSEAU : conservateur au Cabinet des monnaies, médailles et antiques, Bibliothèque nationale, Paris
- Josèphe JACQUIOT : conservateur honoraire du Cabinet des médailles de Paris, ancien professeur à l'École du Louvre, professeur à la Monnaie de Paris
Classification
Médias
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