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GLYPTIQUE

Les pierres gravées du Moyen Âge au XIXe siècle

Le Moyen Âge

L'art de la glyptique disparaît après les invasions germaniques du ve siècle ; les Barbares transformèrent les gemmes en ex-voto qu'ils offraient aux églises. Les intailles païennes servirent à la décoration des croix, des châsses, des reliquaires, des calices et des ciboires, voire des vêtements sacerdotaux et des évangéliaires. En outre, elles conservèrent leur antique usage de sceaux : certains actes des rois Pépin et Carloman furent même scellés avec des gemmes représentant Auguste, Diane, Bacchus. Le premier sceau de Charlemagne fut une tête de Marc Aurèle enchâssée dans une monture sur laquelle était gravée la légende : CHRISTE PROTEGE KAROLVM REGEM FRANCORVM ; un diplôme de l'an 812 porte l'empreinte d'un second cachet, une tête de Sérapis.

Des exemples de ces adaptations sigillaires des gemmes grecques et romaines se retrouvent jusqu'au xvie siècle dans les chancelleries royales, celles des barons, des prélats et des monastères. Les œuvres de la glyptique antique ont constitué les riches trésors des cathédrales et des abbayes, tel celui de l'abbaye de Saint-Denis.

À partir du xe siècle, l'usage des sceaux de métal étant prépondérant, les intailles ne furent plus utilisées que pour les cachets de petite dimension et pour les contre-sceaux.

Les gemmes antiques, notamment les pierres gnostiques, furent considérées au Moyen Âge comme des amulettes douées d'un pouvoir magique. Portées au cou, sur la poitrine, au bras ou montées en bague, elles étaient supposées guérir tous les maux. Ces remèdes trouvèrent crédit chez des auteurs comme Gerbert, Avicenne, Albert le Grand, et même chez Thomas d'Aquin, qui s'intéresse aux propriétés curatives des gemmes. Les alchimistes cherchèrent à démontrer les rapports qui existaient entre les gemmes, les métaux et les planètes. La rédaction des traités de gemmes fut attribuée aux mages de l'Orient. Le célèbre De gemmis de Marbode, l'évêque de Rennes, copié, traduit en vers et en prose, imité à travers tout le Moyen Âge, n'était qu'une transcription d'écrits de l'Antiquité avec des emprunts aux Pères de l'Église. Plusieurs livres de ce genre furent en vogue : Imagines seu sigilla Salomonis, consulté jusqu'au xviie siècle, le De imaginibus attribué à Ptolémée, le Livre d'Énoch, le fameux Lapidaire d'Alphonse X.

Pourtant le Moyen Âge eut aussi ses graveurs en pierres fines ; au temps des successeurs de Charlemagne furent gravés par des artistes occidentaux, élèves des Byzantins, de beaux cristaux. Le chef-d'œuvre de la glyptique carolingienne est l'intaille conservée au British Museum, représentant des scènes de la vie de Suzanne. On possède, datant de la même époque, une croix reliquaire du trésor d'Aix-la-Chapelle, décorée d'un portrait de Lothaire, gravé sur un béryl. Plusieurs crucifixions gravées sur des cristaux sont conservées dans les trésors de Conques, de Guarrázar à Madrid, ou encore au musée de Rouen.

À partir du xiiie siècle, une corporation de lapidaires ou cristalliers s'installe à Paris ; d'après les statuts qui sont insérés dans le Livre des métiers d'Étienne Boileau, ils taillaient le cristal de roche naturel et les autres pierres fines pour en orner des bijoux, faire des coupes, graver des sujets en creux ; ils se distinguaient des voirriniers qui fondaient et teignaient le verre et les pâtes de verre. C'est à propos de ces fondeurs de verre que Thomas d'Aquin écrivait : « Il y a des hommes qui fabriquent des pierres précieuses artificielles. »

La Renaissance italienne et française

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Écrit par

  • : conservateur au Cabinet des monnaies, médailles et antiques, Bibliothèque nationale, Paris
  • : conservateur honoraire du Cabinet des médailles de Paris, ancien professeur à l'École du Louvre, professeur à la Monnaie de Paris

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Médias

Cachet montrant un héros combattant un taureau ailé - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Cachet montrant un héros combattant un taureau ailé

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