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GOMBERVILLE MARIN LE ROY DE (1600-1674)

Écrivain français, dont les romans ont connu une vogue exceptionnelle, Gomberville débuta très tôt dans la poésie, mais médiocrement ; il s'intéresse de bonne heure à l'histoire : en 1620, il rédige un Discours des vertus et des vices de l'histoire, et de la manière de la bien escrire — mais déjà il s'est tourné vers le roman ; il a publié à dix-neuf ans L'Exil de Polexandre et d'Ériclée (1619), première version de ce qui sera son œuvre majeure ; et deux ans plus tard un second roman, La Carithée. Il se fait ainsi rapidement un nom dans le monde des lettres (en même temps qu'une place enviable dans la société) ; il sera l'un des premiers membres de l'Académie française et s'y montrera l'un des plus actifs. En 1629, il donne une seconde édition — en fait totalement refondue — de L'Exil de Polexandre. Le public attend une suite : mais c'est le début d'un nouveau Polexandre (le livre portera désormais ce simple titre), encore remanié, qui paraît en 1632 ; quatre autres livres suivront, jusqu'à la dernière édition, celle de 1637. Chaque fois Gomberville, selon le mot de Chapelain, « rhabille son roman » et en modifie l'équilibre général. Cette singulière méthode de composition ne facilite pas l'accès à une œuvre dont, dès le départ, l'intrigue était fort embrouillée et la nature indécise (tandis qu'il entraîne ses personnages d'une aventure à l'autre, et du Mexique à l'Arménie, l'auteur fait passer le lecteur du documentaire au récit fantastique, de la description exacte — ou parfois fantaisiste — de voyages et de guerres, de pays lointains et de mœurs étranges, à la relation d'exploits chevaleresques et merveilleux). Mais Gomberville fait du désordre vertu, et les contemporains ne semblent avoir été gênés ni par la longueur du livre (plus de 4 400 pages ; La Fontaine déclare l'avoir « lu vingt et vingt fois ») ni par son cours capricieux (Guez de Balzac voit en lui « un ouvrage parfait en son genre »). C'est que, dans ce roman-fleuve où le lecteur moderne se perd, toute une génération a trouvé — outre un aliment à sa curiosité pour l'exotisme — des héros en qui se reconnaître. On s'est amusé aussi à y traquer tous les emplois de cette malheureuse conjonction car à qui, lors de ses débuts, en fougueux admirateur de Malherbe, l'auteur avait déclaré la guerre et qu'il s'était vanté (à défaut d'en avoir purgé la langue française) d'avoir bannie de son Polexandre : à une ou deux bavures près, la gageure est tenue dans l'édition de 1629 ; mais Gomberville y a ensuite renoncé. De 1633 à 1642, paraît un nouveau roman, La Cythérée. Mais la maladie et la lassitude poussent l'écrivain à la retraite. Un moment tenté par le stoïcisme (ainsi qu'en témoigne la Doctrine des mœurs tirée de la philosophie des stoïques), il se convertit au jansénisme. Sans se couper du monde, il mène une vie réglée, consacrée à la dévotion et aux bonnes œuvres. Il n'abandonne sans doute pas toute préoccupation littéraire (prenant la défense de la poésie auprès des solitaires, il gagne Port-Royal au parti des malherbiens ; il publie même une suite inachevée de Polexandre, La Jeune Alcidiane, qu'il habille de sermons jansénistes) mais, bientôt, il n'écrit plus que des poèmes de circonstance et de piété, et regrette le mal qu'il a pu faire avec ses romans. Palinodie comme le siècle en entendra encore... Pourtant cette image dans laquelle on fige souvent Gomberville vieilli ne sera pas la dernière : à partir de 1660, il prend ses distances vis-à-vis de Port-Royal et se consacre à nouveau à des études historiques (il réunit, en vue de la publication des Mémoires de monsieur le duc de Nevers, une énorme documentation[...]

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, maître assistant à l'université de Paris-VII

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