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GORAKHNĀTH (XIIe s.)

Personnage dont on sait peu de chose, sinon qu'il a dû naître dans le premier quart du xiie siècle dans un village du piémont himalayen, et qui apparaît, sinon comme le fondateur de la secte des Nāths, du moins comme celui qui lui donna ses premières lettres de noblesse sous la forme de textes sanskrits où la doctrine du mouvement se trouvait définie. Ces traités sont presque tous perdus et l'on ne connaît plus de Gorakhnāth qu'un court poème (172 shlokas) désigné comme la « Centurie de Goraksha » (Gorakṣa-śataka) ou « Paroles de Goraksha » (Gorakṣavaana-saṁgraha). Bien que la chose n'apparaisse pas dans ce texte, assez neutre de contenu, le maître est célèbre en Inde pour la forme extrême de tantrisme qu'il prêcha. Autour de lui se forma, dit-on, une communauté de yogins pratiquant tous les « rites de la main gauche », au grand scandale des hindous orthodoxes. Sans doute, par mesure de protection, mais suivant en cela une tradition immémoriale, la secte se constitua en société secrète comportant une cérémonie d'initiation très dure au cours de laquelle les oreilles de l'impétrant étaient percées (d'où le nom d'« oreilles percées », kānphaṭa, donné à ces yogins) et pourvues de lourdes boucles d'oreilles. En vue d'obtenir la maîtrise de toutes les « puissances » latentes de son corps, le disciple était ensuite invité à pratiquer avec le maximum d'intensité les exercices physiques préconisés par le hatha yoga et à dépasser les normes traditionnelles de la vie sociale ; ainsi, transgressant les interdits alimentaires, les disciples de Gorakhnāth mangent de la viande de bœuf ; violant les tabous sexuels, ils se livrent à l'homosexualité, à la nécrophilie, à la bestialité ; enfin, pour se rendre maîtres de la nature, ils pratiquent l'alchimie et la magie noire. On prendra garde cependant au fait que, selon Gorakhnāth, de telles attitudes sont ordonnées dans un but qui les transcende absolument : l'obtention du salut conçu comme l'union béatifique de l'âme individuelle avec l'âme cosmique, dont la forme divine est Śiva.

— Jean VARENNE

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, professeur à l'université de Lyon-III

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