KELLER GOTTFRIED (1819-1890)
La formation du conteur
C'est par le volumineux roman autobiographique Henri le Vert (Der grüne Heinrich), publié en 1854, mais connu dans la rédaction de 1880, que Keller inaugura sa carrière de conteur.
L'œuvre décrit l'échec d'une vocation de peintre après des études qui plongent le héros dans la misère. Lorsque Henri abandonne enfin la peinture et rentre auprès de sa mère, elle vient de mourir de chagrin et lui-même met fin à sa vie.
Les caractères fondamentaux de l'art de Keller se montrent clairement dans ce premier récit. C'est d'abord l'imagination du peintre. Elle n'est pas exempte de tendances romantiques qui apparentent Keller aussi bien à Hoffmann qu'à Jean-Paul. Par contre, Keller ignore les atmosphères poétiques sentimentales, telles qu'on les trouve, par exemple, dans les premières nouvelles de Storm. Il ne cherche pas non plus à saisir les forces mystérieuses de l'existence. Plus tard, il s'opposera aux descriptions sans beauté du naturalisme ; il restera également étranger aux tendances biologiques de ce mouvement et à son intérêt pour les forces instinctives et inconscientes. Le monde clair de Keller, en dépassant le romantisme, devient un monde de la joie des sens et de la vie morale. La première est incarnée dans le personnage de Judith, tandis que le disciple de Feuerbach et sa nièce Dortchen Schönfund, rencontrés par Henri peu avant la fin du roman, lui enseignent ce que peut être une vie harmonieuse et un amour où s'unissent le bonheur des sens et l'exigence du cœur.
Le premier volume du recueil de nouvelles Les Gens de Seldwyla (Die Leute von Seldwyla), paru en 1856, appartient encore à la même période. Passablement baroque est l'invention principale du récit des trois (prétendus) justes, fabricants de peignes de leur métier, qui rivalisent dans une course à travers la ville pour décider qui aura la main d'une demoiselle déjà passablement âgée et prétentieuse. La transparence du détail s'élève, par contre, jusqu'à la poésie, dans la nouvelle de Roméo et Juliette au village, dont la fin, moins ambiguë que celle de Henri le Vert, réalise dans la mort l'accomplissement du bonheur terrestre des amants.
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Écrit par
- Maurice MARACHE : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Nice
Classification
Média
Autres références
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SCHOECK OTHMAR (1886-1957)
- Écrit par Alain FÉRON
- 1 219 mots
Les deux domaines d'élection du compositeur suisse Othmar Schoeck furent le lied et la scène. Né le 1er septembre 1886 à Brunnen (canton de Schwyz), Othmar Schoeck est le fils du peintre paysagiste Alfred Schoeck. Après avoir hésité entre la peinture et la musique, il entre en 1904 au Conservatoire...