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LEIBNIZ GOTTFRIED WILHELM (1646-1716)

Sartre et Nizan s'amusaient à dessiner une monade au bain. Mais une monade peut-elle prendre un bain ? On dirait aujourd'hui : oui ! Car il n'est pas de monades sans organes. Les concepts de G. W. Leibniz, parfois étranges, demandent une grande attention aux textes et à leurs contextes. C'est sans doute pourquoi son œuvre connut une étrange destinée. Ce philosophe baroque, à la fois très connu et méconnu, est fondamentalement peu lu. Il est encore moins replacé dans le siècle de Louis XIV (1638-1715) avec son contexte européen fait de controverses scientifiques, philosophiques et politiques dont Leibniz fut une sorte de plaque tournante. Pourtant, la phénoménologie en a fait le précurseur de l'intentionnalité, tandis que la philosophie analytique salue en lui le logicien de génie, précurseur de Boole, fondateur de la logique mathématique. On admire en Leibniz, depuis Fontenelle jusqu'à Lévi-Strauss et Deleuze, le penseur universel conjuguant les disciplines, le génie rationnel et multiforme cherchant à concilier la raison avec les faits et les dogmes, l'inventeur de concepts mathématiques et métaphysiques, le philosophe du progrès des arts et des sciences en vue du bonheur du genre humain. On voit en lui le précurseur des Lumières, de l'Encyclopédie de Diderot et D'Alembert, de la logique formelle, de la cybernétique, ou du structuralisme.

La recherche leibnizienne a beaucoup progressé depuis un siècle grâce à l'édition de textes encore largement inconnus des grands commentaires du début du xxe siècle (Russel, Cassirer, Couturat). Penseur systématique, Leibniz n'est pourtant pas l'auteur d'un « système » à la manière de l'Éthique de Spinoza. On ne trouvera pas chez lui de propositions premières dont on pourrait déduire une doctrine d'ensemble. Leibniz, penseur du détail et des singularités, a toujours une vue d'ensemble. Mais son œuvre est dispersée, faite de fragments, d'opuscules, d'essais, de lettres, de programmes de recherche rédigés en latin et en français. Le philosophe a continué à modifier et à enrichir ses vues jusqu'à sa mort en 1716, avec cette constante exigence de clarté et de rationalité qui fait son style propre. C'est une œuvre vivante, faite de multiples « points de vue » ou perspectives, dont il faut retracer le devenir, plus proche des Variations Goldberg de Bach que d'une cathédrale gothique.

Des instruments pour la raison

G.W. Leibniz - crédits : Photos.com/ Jupiterimages

G.W. Leibniz

Gottfried Wilhelm Leibniz, né le 1er juillet 1646, perd tôt un père professeur de sciences morales qui lui avait appris à lire dans des livres d'histoire. Il fut autorisé à vagabonder dans la bibliothèque paternelle malgré l'inquiétude de certains précepteurs alarmés par sa précocité. Il y acquit le goût de la libre recherche, voletant de poésie en philosophie, mathématiques, histoire, ou droit, selon un bon plaisir inséparable de son questionnement multiforme. Entré en classe de logique à douze ans, il s'enthousiasme pour l'art de la démonstration et les Catégories d'Aristote. Leibniz passe pour un prodige. Il entre à l'université de Leipzig en 1661, avant ses quinze ans. Il obtient son baccalauréat avec un mémoire resté célèbre sur le Principe d'individuation (1663). Toute sa vie, il reviendra sur cette question cruciale : qu'est-ce qui individue les êtres du monde, êtres vivants et existants, et les distingue des entités logiques et mathématiques invariables ? Puis il étudie les mathématiques à Iéna pendant un semestre. À son retour, il s'initie à la jurisprudence, cherchant à ordonner la profusion des exemples à l'aide de la logique, réclamant pour le droit la rigueur des démonstrations mathématiques. Il soutient plusieurs mémoires (De conditionibus, De complexionibus, De casibus perplexis in juris) qui lui valent[...]

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Écrit par

  • : professeure des Universités, professeure de philosophie à l'université de Paris-Ouest-Nanterre-La Défense

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G.W. Leibniz - crédits : Photos.com/ Jupiterimages

G.W. Leibniz

<it>Présentation des membres de l’Académie des sciences par Colbert à Louis XIV</it>, Henri Testelin, d’après Charles Le brun - crédits :  Fine Art Images/ Heritage Images/ Getty Images

Présentation des membres de l’Académie des sciences par Colbert à Louis XIV, Henri Testelin, d’après Charles Le brun

<it>Candide ou l'optimisme</it>, de Voltaire - crédits :  De Agostini Picture Library/ Getty Images

Candide ou l'optimisme, de Voltaire

Autres références

  • LEIBNIZ : CALCUL DIFFÉRENTIEL

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    Gottfried Wilhelm Leibniz (1646-1716) publie en 1684 les détails de son calcul différentiel dans son traité Nova methodus pro maximis et minimis, itemque tangentibus. Il y reprend ses découvertes antérieures. Il avait introduit la notation moderne d'une intégrale dès 1675, calculé les dérivées...

  • MONADOLOGIE, Gottfried Wilhelm Leibniz - Fiche de lecture

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    G. W. Leibniz (1646-1716) n'a publié de son vivant qu'un seul ouvrage d'importance, la Théodicée (1710). La mort de Locke, en 1704, le dissuada de publier les Nouveaux Essais, en réponse à l'Essai sur l'entendement humain du philosophe anglais. Renommé dans toute l'Europe...

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    ...montrer que le système absolu, l'absolu comme système, loin de les résorber, leur confère l'être, puisqu'il est posé comme l'unique mesure de ce qui est. Le génie de Leibniz s'y est employé. Chaque être, explique-t-il, est sa détermination propre, intrinsèque, mais puisque toute détermination implique le...
  • AFFECTIVITÉ

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    ...particulier de l'union universelle des idées avec leurs objets (M. Gueroult), devant être traité dans ce cadre plus global. Sur ce point, on le sait, Leibniz considère l'union de l'âme et du corps dans la monade – l'âme étant l'unité du corps et le corps le point de vue de l'âme – comme l' harmonie...
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  • ART (Aspects esthétiques) - Le beau

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