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GRÂCE À DIEU (F. Ozon)

François Ozon - crédits : Nacho López/ Agefotostock

François Ozon

Depuis 1998 et son premier long-métrage, Sitcom, rares auront été les années sans un nouveau film de François Ozon. Sujets originaux (Sous le sable, 2000), adaptations de romans (Angel, 2006 ; Jeune et jolie, 2013), de pièces de théâtre, piochées chez Fassbinder (Gouttes d’eau sur pierres brûlantes, 2000) ou dans le répertoire de boulevard (Huit femmes, 2001 ; Potiche, 2010), variations sur d’autres films (SwimmingPool, 2003, s’inspire de La Piscine de Jacques Deray ; Frantz retravaille un film de Lubitsch de 1932, L’Homme que j’ai tué). Une filmographie éclectique faite de comédies, thrillers, drames et mélodrames, dont le dénominateur commun serait sans doute la transgression et la marque de fabrique celle d’une certaine sophistication. Une production au sein de laquelle Grâce à Dieu, grand prix du jury à la Berlinale 2019, tranche radicalement.

Une fiction documentaire

<em>Grâce à Dieu</em>, F. Ozon - crédits : Jean-Claude Moireau/ Mandarin Films/ Scope Pictures/ BBQ_DFY/ Aurimages

Grâce à Dieu, F. Ozon

Si, avec Jeune et jolie, il avait abordé un sujet de société, la prostitution estudiantine, François Ozon s’attaque cette fois à un sujet brûlant, celui de la pédophilie dans l’Église, et puise dans l’histoire immédiate. Avec un souci documentaire marqué, il reconstitue la révélation de l’affaire Preynat et de son corollaire, l’affaire Barbarin. Prêtre du diocèse de Lyon, Bernard Preynat, qui n’a jamais nié les faits, a été mis en examen en janvier 2016 et placé sous contrôle judiciaire pour abus sexuels perpétrés sur des scouts, entre les années 1970 et 1990 (plus de 80 victimes se sont déclarées). Désormais interdit d’exercer son ministère, il fait, en outre, l’objet d’un procès canonique. Philippe Barbarin, cardinal archevêque de Lyon, informé des faits dès 2014, selon les victimes, a été jugé et condamné pour non-dénonciation d’agressions sur mineurs, en mars 2019. Grâce à Dieu, qui doit son titre à un mot « malheureux » du cardinal Barbarin, « Nous sommes confrontés à des faits anciens, et grâce à Dieu, tous ces faits sont prescrits », relate la création de l’association La Parole libérée, en décembre 2015 et, s’appuyant sur le témoignage de ses membres, se concentre sur les victimes du père Preynat. Jamais manichéen et loin de tout sensationnalisme, le film met en lumière l’étonnant et très long silence de l’Église. François Ozon, qui a conservé les véritables prénoms des victimes, leur a en revanche octroyé, pour cause de fiction, d’autres patronymes, ce qu’il n’a pas fait pour les personnages du père Preynat (interprété par Bernard Verley), du cardinal Barbarin (François Marthouret) et de sa médiatrice, Régine Maire (Catherine Erhel), jugeant qu’il aurait été ridicule de les modifier puisque connus de tous. Ce choix lui a valu deux assignations en référé visant à faire reporter la sortie du film, prévue quelques jours plus tard, l’une de la part de Régine Maire, demandant à ce que son nom soit retiré du film, l’autre de l’avocat du père Preynat, au nom de la présomption d’innocence, l’affaire n’étant pas encore passée devant les tribunaux. On sait que la justice a cru bon trancher en faveur du film.

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François Ozon - crédits : Nacho López/ Agefotostock

François Ozon

<em>Grâce à Dieu</em>, F. Ozon - crédits : Jean-Claude Moireau/ Mandarin Films/ Scope Pictures/ BBQ_DFY/ Aurimages

Grâce à Dieu, F. Ozon