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GRANITES ET RHYOLITES

Origine et cristallisation

La diversité d'aspect des massifs granitiques et l'homogénéité relative de leurs compositions ont donné lieu à de longues et âpres discussions, la controverse du granite, née de l'opposition de deux écoles : «  neptuniste », avec A. G. Werner qui supposait le granite très ancien et produit par la sédimentation au sein d'un océan primitif, et «  plutoniste », avec J. Hutton, qui insista dans sa thèse, en 1787, sur l'origine profonde et le mode intrusif de la mise en place du granite. Cette « controverse », partant d'observations différentes sur des objets différents, n'avait de chances d'aboutir que par des expérimentations en laboratoire. Dès le début du xixe siècle, un élève de J. Hutton, J. Hall, faisait fondre des roches magmatiques.

Travaux expérimentaux portant sur l'origine des granites

Liquides résiduels - crédits : Encyclopædia Universalis France

Liquides résiduels

De nombreux travaux expérimentaux ont porté sur des systèmes synthétiques ou sur des systèmes naturels. Les travaux de O. F. Tuttle et de N. L. Bowen (1958) sont essentiels pour la compréhension du problème des granites. La majorité des granites dans le monde étant constitués à peu près exclusivement de quartz, de feldspath alcalin et de plagioclase, ils ont limité leurs travaux au « système résiduel » synthétique SiO2—KAlSi3O8—NaAlSi3O8—H2O (fig. 2). Ce système présente un minimum thermique M : en cristallisant, tout magma silicaté expulse un liquide devenant de plus en plus granitique. Une preuve de cette hypothèse est que l'ensemble des compositions de granites et de rhyolites dans le monde coïncide avec l'ensemble des points M déterminés pour des pressions de 1 à 5 kb (fig. 2b). O. F. Tuttle et N. L. Bowen ont conclu que les granites constituaient les produits les plus évolués et les plus tardifs de la cristallisation des magmas silicatés.

À la même époque, H. G. F. Winkler et F. von Platen ont suivi la démarche inverse : ils ont fondu des roches. Leurs matériaux de départ étaient synthétiques ou naturels. À 2 kb de pression d'eau et vers 600-700 0C, ils ont obtenu à partir de roches métamorphiques un liquide de composition granitique et un résidu infusible riche en micas et en silicates d'alumine, reproduisant ainsi en laboratoire un phénomène géologique très répandu dans les zones profondes des chaînes de montagnes : l'anatexie, ou fusion partielle avec production de corps granitiques diffus. Des magmas de composition granitique peuvent se former et cristalliser à des températures de l'ordre de 700 0C ; ces températures sont facilement atteintes dans la croûte, à condition que les teneurs en eau du milieu soient suffisantes.

Apparition et croissance des minéraux

Le refroidissement d'un magma granitique conduit à une roche cristallisée selon une continuité en deux étapes : le « liquidus » caractérise le passage de l'état totalement liquide à l'état solide + liquide, et le « solidus », le passage de l'état solide + liquide à l'état totalement solide.

Les phénomènes de cristallisation sont complexes : successivement, différents minéraux apparaissent, certains disparaissent et les compositions des phases minérales varient. L'observation des relations entre les cristaux de familles minérales différentes (les minéraux précoces sont inclus dans les minéraux plus tardifs) permet d'établir à partir du liquidus un ordre de cristallisation. Il n'est pas toujours facile de mettre en évidence l'association minérale cristallisant au solidus, car, fréquemment, les minéraux d'altération prennent alors le relais. Ils sont produits directement à partir de fluides percolant dans les pores de la masse granitique solidifiée ou proviennent de réactions de déstabilisation des minéraux magmatiques : développement de mica blanc, chlorite et épidote, transformations des feldspaths[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-Sud
  • : professeur de géologie à l'université de Bretagne-Occidentale, Brest
  • : directeur de recherche à l'Institut national de la recherche agronomique, membre de l'Académia Europaea
  • : directeur de recherche à l'Institut national de la recherche agronomique, chargé de mission auprès du ministre de l'Écologie, membre de l'Académie d'agriculture de France

Classification

Médias

Granite - crédits : Jacques-Marie Bardintzeff

Granite

Composition chimique des principaux granites - crédits : Encyclopædia Universalis France

Composition chimique des principaux granites

Diagramme de Streckeisen - crédits : Encyclopædia Universalis France

Diagramme de Streckeisen

Autres références

  • AFRIQUE (Structure et milieu) - Géologie

    • Écrit par
    • 18 789 mots
    • 22 médias
    L'Archéen se présente en Afrique australe soit sous forme d'associations granites-ceintures vertes, soit comme des bassins cratoniques qui se développent sur les zones déjà stabilisées, soit sous forme d'associations gneiss-granulites.
  • AMÉRIQUE (Structure et milieu) - Géologie

    • Écrit par , , , , , , et
    • 24 158 mots
    • 23 médias
    Les plutons granitiques calco-alcalins se sont mis en place au Trias, au Jurassique, au Crétacé et au Cénozoïque. Le batholite complexe de la sierra Nevada est l'un des plus connus ; il se poursuit au sud dans la partie nord de la péninsule de Basse-Californie, constituant de ce fait, dans le domaine...
  • ARCHÉEN

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    • 3 036 mots
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    Cesgranites, aussi nommés sanukitoïdes ou high magnesium granitoids (5 à 10 p. 100 du volume des terrains archéens), sont intrusifs dans le socle granito-gneissique et les ceintures de roches vertes. Ils s'agit de vrais granites à affinité calco-alcaline et le plus souvent très riches en phénocristaux...
  • FRANCE (Le territoire et les hommes) - Géologie

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    Tous les terrains précédents forment de simples panneaux, isolés à l'intérieur du vastebatholite granitique qui s'étend, sur 400 kilomètres, de Calvi à la Sardaigne orientale. Mis en place au Carbonifère entre 350 et 300 millions d'années, ces granitoïdes calco-alcalins, généralement gris et altérables,...
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