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GRAVITATION ET ASTROPHYSIQUE

Équilibre gravitationnel et relaxation de l'énergie dans les étoiles

Lord Kelvin - crédits : Herbert Barraud/ Getty Images

Lord Kelvin

Après la percée décisive que constituait la mesure de G, l'interprétation physique des phénomènes gravitationnels progressa peu durant près d'un siècle, si l'on excepte quelques spéculations audacieuses qui préfiguraient la théorie moderne des trous noirs : John Michell lui-même, dès 1784, puis Pierre Simon de Laplace, en 1796, montrèrent qu'un corps suffisamment massif et compact pourrait avoir un champ gravitationnel assez intense pour empêcher même la lumière d'échapper à son attraction. Pour qu'un projectile puisse s'échapper dans l'espace à partir de la surface d'un corps sphérique de rayon R et de masse M, sa vélocité initiale v devrait être telle que son énergie cinétique par unité de masse, v2/2, dépasse l'énergie gravitationnelle correspondante, GM/R. Si l'on admet la représentation de la lumière en termes de corpuscules émis avec la vitesse c et soumis à la mécanique newtonienne, on en déduit qu'elle ne pourra pas être émise à partir d'un tel corps de masse M et de rayon R à moins que R n'excède une valeur critique (appelée « rayon de Schwarzschild ») égale à 2 GM/c2 (pour un corps ayant la densité du Soleil, le rayon critique est du même ordre de grandeur que le diamètre de l'orbite de la Terre). Toutefois, il était prématuré à cette époque de spéculer sur l'existence de tels corps célestes invisibles, car cela soulevait des questions insolubles avant le développement, au cours du xxe siècle, des théories relativistes de la gravitation. À cette époque, les théories mathématiques progressaient considérablement grâce à différents chercheurs, notamment d'Alembert et Laplace, qui rendirent possible la reformulation de la loi newtonienne de la pesanteur dans le langage de la mécanique du continu. Dans ce formalisme, la loi originelle (1) de l'inverse du carré de la distance se trouve remplacée par l'équation de Poisson (1813), qui relie le potentiel du champ gravitationnel U à la densité de matière de la source ρ par la relation :

où ∇2 représente l'opérateur de Laplace, c'est-à-dire la divergence du gradient. Mais, contrairement aux mathématiques pures, les progrès en physique furent différés jusqu'au développement de la thermodynamique et de la théorie cinétique des gaz, au milieu du xixe siècle. Il devint alors possible, pour la première fois, d'essayer de comprendre la structure du Soleil, considéré comme un corps gazeux dans lequel la distribution de matière est déterminée par l'équilibre entre les forces autogravitationnelles et la pression du gaz. Une fois que le lien entre la pression du gaz, l'énergie thermique macroscopique et l'énergie cinétique des particules constituantes eut été trouvé, un nouveau domaine s'ouvrit à l'investigation mathématique. Un résultat particulièrement important et utile fut le théorème du viriel reliant le potentiel d'attraction mutuelle Ω (intrinsèquement négatif) à l'énergie cinétique interne T du gaz d'un corps sous l'effet de sa propre gravitation. Après avoir été développé sous différentes formes par plusieurs chercheurs du xixe siècle, le théorème du viriel fut exprimé de manière particulièrement succincte par Henri Poincaré en 1912 :
Cette relation reste valable si le corps n'est pas exactement à l'équilibre statique (à condition de faire la moyenne des oscillations) pourvu que seules des forces (gravitationnelles et éventuellement électrostatiques) suivant une loi en 1/r2 entrent en jeu entre les particules constituantes. Dans ces conditions, le théorème peut s'appliquer avec une excellente précision au Soleil et aux autres étoiles « ordinaires » (étoiles de la séquence principale), mais[...]

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Écrit par

  • : membre de la Royal Society de Londres, maître de recherche au C.N.R.S., responsable de l'astrophysique relativiste à l'Observatoire de Paris

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