GRÈCE ANTIQUE (Civilisation) Les arts de la Grèce
La peinture funéraire
Les découvertes faites à la fin des années 1960 en Italie, en Asie Mineure, en Macédoine ont apporté des données de première importance pour la reconstitution de la « grande » peinture grecque, ravivant des débats anciens, faisant naître d'autres problèmes. Il s'agit de fresques, conservées parce qu'elles ornaient des tombeaux, datant de deux moments cruciaux dans l'histoire de la peinture ancienne : l'archaïsme d'une part, l'époque classique et la première phase de l'art hellénistique de l'autre. On peut y voir le passage d'un type de peinture qui ne rompt pas vraiment avec celui de l'Égypte ou de la Crète (rappelons, pour l'art minoen, le témoignage exceptionnel de Théra (Santorin), la « Pompéi » des Cyclades) au mode de représentation « réaliste », qui devait donner à l'art occidental sa première forme et ses premiers théoriciens.
La période archaïque
Les documents nouveaux, en ce qui concerne la période archaïque, proviennent des deux extrémités du monde grec, l'Italie méridionale, avec la tombe du Plongeur de Paestum, et l'Asie Mineure, avec les tombes lyciennes de Kizilbel et Karaburun. Dans les deux cas, les peintures sont réalisées à l'aide d'aplats de couleurs se détachant sur un fond blanc, l'enduit à base de chaux assurant la prise des couleurs. Les figures sont délimitées par un contour noir, un dessin préparatoire est assuré par un trait rouge (Kizilbel) ou incisé dans l'enduit (Paestum).
Les tombes de Kizilbel et de Karaburun en Lycie
Les fresques lyciennes ont été découvertes dans deux tombes à chambre, recouvertes toutes deux d'un tumulus ; elles ont été dégagées (la première à partir de 1969 ; la seconde, de 1970) par l'équipe américaine du Bryn Mawr College, sous la direction de M. J. Mellink. Il s'agit de deux documents de première importance pour la connaissance de l'art d'Asie Mineure, dans cette zone de contact entre la Grèce et l'Orient. Ils le sont tout autant pour l'histoire de la peinture, par la finesse de leur exécution et par les données qu'ils apportent sur les peintres grecs du milieu ionien, au moment même où certains d'entre eux émigraient en Occident devant l'avance perse. Les tombes lyciennes offrent de ce fait des possibilités de confrontations directes avec les fresques étrusques contemporaines. La tombe la plus ancienne (env. 525 av. J.-C.), celle de Kizilbel, présente un décor de frises superposées de hauteurs différentes. Malgré l'état, souvent défectueux, de conservation des peintures, on peut lire deux grandes scènes sur les parois sud et ouest : une scène mythologique (Persée décapitant Méduse), une scène où un guerrier monté sur un char conduit par un cocher prend congé d'une femme (le char est précédé d'un démon ailé qui tend une fleur de lotus) ; plus loin, les traces d'un banquet. On lit, en outre, sur le mur nord, le voyage en bateau d'un personnage important. Sur la frise étroite qui surmonte la fresque précédente, on relève, au fil des parois, une succession de scènes : chasse, processions, file de guerriers. Les fresques de Karaburun présentent une organisation plus simple ; une scène unique se détache au-dessus du socle. Sur la paroi du fond est figuré un banquet : un homme étendu sur un lit tend le bras vers deux serviteurs. Derrière lui, une femme, suivie par deux serviteurs, présente une bandelette et un vase à parfum. Sur les parois latérales se trouvent deux fresques plus petites, à gauche une scène de combat, à droite une procession difficile à interpréter : un personnage assis sur un chariot est suivi par deux serviteurs et par un deuxième char qui transporte un grand coffre rouge. On rencontre des figurations voisines sur des stèles funéraires d'Asie Mineure ; il s'agit[...]
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Écrit par
- Pierre DEVAMBEZ : conservateur en chef au musée du Louvre
- Agnès ROUVERET : professeur à l'université de Paris X-Nanterre
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