- 1. Le poids de l'histoire, le choc de la modernité
- 2. Une démographie de pays riche : malthusianisme et immigration
- 3. L'agriculture : résistances et disparités géographiques
- 4. L'industrie : développement et restructurations
- 5. L'échange : consommation intérieure et mondialisation
- 6. Des dissymétries régionales maintenues
- 7. Métropolisation et développement touristique : des remaniements des dynamismes géographiques
- 8. Bibliographie
GRÈCE Espace et société
Capitale | Athènes |
Langue officielle | Grec |
Unité monétaire | Euro (EUR) |
Population (estim.) |
9 456 000 (2024) |
Superficie |
132 049 km²
|
L'agriculture : résistances et disparités géographiques
L'espace rural est remarquable par ses contrastes d'archaïsmes et de modernités. La pluriactivité, la proximité des villages et des villes, l'accélération des mobilités, rendent de jour en jour plus fluide la frontière entre campagnes et monde urbain. De même, la petite taille des exploitations, l'émiettement traditionnel des parcelles, la faiblesse de la productivité agricole, doivent être regardés avec précaution, en raison de la complexité des statuts fonciers, des contrats de location multiples et de l'intensification poussée des systèmes de cultures. Ainsi, s'additionnent les traditions persistantes de la polyculture méditerranéenne, et des spécialisations régionales ou locales, parfois même individuelles.
Pourtant, partout en Grèce se sont accentués, à partir des années 1960, les signes de modernisation de l'agriculture. Grâce aux prêts d'une Banque agricole active, la mécanisation des exploitations s'est développée. L'utilisation des engrais chimiques s'est accrue. L'irrigation a fait aussi des progrès considérables. À la faveur de travaux d'aménagement hydraulique, le remembrement a fait son apparition dans les plaines alluviales de la Grèce du Nord.
Mais le principal moteur de changement fut l'application de la politique agricole commune européenne (P.A.C.). Le soutien généralisé des prix entraîna une extension souvent spectaculaire des surfaces cultivées (oliviers), l'augmentation considérable des rendements, et une hausse des revenus des agriculteurs. C'est dire combien l'annonce, au milieu des années 1990, d'une révision de la P.A.C. au profit d'une production plus soucieuse du respect des consommateurs et des écosystèmes, et l'arrivée de nouveaux bénéficiaires potentiels (Pologne, Roumanie, Bulgarie) sèment l'inquiétude dans les campagnes grecques. Avec le vieillissement généralisé des exploitants, ces retournements de la conjoncture institutionnelle constituent la grande incertitude d'un monde rural, toujours prêt à s'enflammer et à menacer les équilibres politiques nationaux.
Les visages ruraux, qui s'étaient composés au fil des évolutions récentes, n'en demeurent pas moins reconnaissables. La longue échine montagneuse qui parcourt le pays du nord au sud reste vouée à une agriculture et à un élevage extensifs et a connu pendant tout le xxe siècle une forte hémorragie démographique, qui achève d'en faire un territoire désertifié de pâturages et de forêts. C'est la Grèce du vide, où l'exode humain fait progressivement reculer les traces de l'anthropisation.
Le monde insulaire, Cyclades en tête, paraît souvent relever du même diagnostic. Mais partout, le littoral signifie le tourisme estival et balnéaire et une population presque entièrement dévolue aux activités qui lui sont liées. Pourtant chacun peut rester attaché à son lopin de terre, à quelques têtes de petit bétail, à une production céréalière résiduelle pour nourrir les bêtes, et à quelques cultures arbustives, parfois aussi symboliques que spéculatives (cas de la vigne à Santorin).
Les grandes plaines agricoles de la Grèce du Nord – Thessalie, Macédoine, Thrace – auxquelles il convient d'ajouter le nord-ouest du Péloponnèse (Élide) constituent un troisième type. Les grandes cultures – coton, blé, tabac, betterave à sucre – associées à l'élevage bovin dominent toute la vie régionale, y compris celle des centres urbains, préfectures de quelques dizaines de milliers d'habitants (Karditsa en Thessalie, Drama en Macédoine, Komotini en Thrace). Sans négliger les problèmes d'environnement, l'incidence des réglementations nationales et européennes est directe sur un milieu professionnel averti, à qui on a inculqué pendant des[...]
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Écrit par
- Guy BURGEL : professeur à l'université de Paris-Ouest-Nanterre-La Défense
Classification
Médias