GRECO (exposition)
Accompagner la Contre-Réforme
La production abondante de Greco à Tolède s’explique par une demande croissante qui a pour sources le développement de la dévotion privée et le renouveau de la pastorale au lendemain de la Contre-Réforme. Cette production se signale par des variations sur les mêmes compositions qui montrent l’évolution de la vision de l’artiste (par exemple dans les représentations du Christ au Jardin des oliviers, du Christ en croix, de Marie-Madeleine, des Apôtres ou de saint François) ; on peut y voir aussi un écho lointain de la pratique byzantine. En contrepoint, les célèbres nocturnes, dont La Fable (vers 1585, Harewood House, Leeds), se rattachent au courant des « nuits » qui traverse de loin en loin le xvie siècle européen, jusqu’à son apogée vers 1650.
Après les sections consacrées au dessinateur dont les feuilles sûres sont très rares, à l’architecte – les denses annotations manuscrites de l’édition vénitienne de 1556 des Dix Livres d’architecture de Vitruve laissent croire au projet d’un nouveau traité – et au sculpteur – seul nous est parvenu le michelangelesque petit Christ ressuscité, représenté nu dans un tabernacle doré, réalisé vers 1595-1598 (Fundación Casa Ducal de Medinaceli, Tolède) –, l’exposition aborde la question du fonctionnement de l’atelier ouvert en 1585 dans les appartements que l’artiste louait au palais du marquis de Villena, celle également de la paternité de certaines toiles de moindre qualité et du rôle du fils de l’artiste, Jorge Manuel.
La fulgurance des coloris de Greco, ces rouges et ces verts de pierres précieuses, ces bleus et gris d’acier, ces ciels lourds de nuées et d’orages, ces figures et ces drapés sublimés par un métier singulier, une pittura di toccosans égale, la belle idée était d’en montrer la métamorphose à la fin du parcours, entre 1570 et 1614, à travers un thème récurrent dans l’œuvre du maître, Le Christ chassant les marchands du temple, représenté par les versions de Washington, de Minneapolis, de Londres et de Madrid. Un magnifique résumé du parcours esthétique de Greco avant le testament ultime, véritable apparition, L’Ouverture du cinquième sceau, ou La Vision de saint Jean (1610-1614, The Metropolitan Museum, New York).
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Écrit par
- Robert FOHR : historien de l'art
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Média