GRÉGOIRE DE NAZIANZE saint (330 env.-env. 390)
Le théologien du paradoxe trinitaire
La pensée théologique de Grégoire de Nazianze s'exprime, dans ses discours, sous une forme plus hymnique que dialectique ; ici encore, on peut reconnaître l'influence du genre littéraire du « discours sacré », en même temps que le reflet d'un tempérament foncièrement poétique. Si la part du raisonnement y est réduite, du moins les formules bien frappées et lourdes de sens y abondent et elles serviront de normes à toute la réflexion théologique postérieure.
Avec Grégoire, le paradoxe trinitaire devient le fait primordial et le point de départ de toute pensée théologique, l'objet privilégié de sa contemplation. La notion de Trinité transcende l'opposition entre l'unité et la multiplicité, comme celle qui existe entre les deux erreurs du judaïsme et du paganisme : Dieu est un, par le fait même qu'il subsiste en trois hypostases, hypostases qui correspondent aux relations intérieures et aux caractéristiques personnelles qui diversifient sans la diviser l'essence divine. Grégoire est le premier à définir les hypostases par les expressions d'innascibilité, de génération et de procession, qui conviennent respectivement au Père, au Fils et à l'Esprit-Saint. Il affirme, avec beaucoup plus de fermeté et de clarté que Basile de Césarée, la divinité de l'Esprit-Saint et, d'une manière générale, il insiste avec vigueur sur l'égalité absolue des personnes divines. Ce qui fera le fond de la doctrine augustinienne de la Trinité est déjà présent chez Grégoire. Il s'ensuit d'ailleurs une transformation radicale de la cosmologie chrétienne : jusque-là, on avait lié, plus ou moins consciemment, la création du monde à la génération du Fils, le Verbe créateur, « émis » pour produire les choses ; cette fois, c'est toute la Trinité qui est indivisiblement créatrice, et son acte créateur est totalement gratuit. Grégoire de Nazianze est également intervenu dans le conflit christologique suscité par Apollinaire de Laodicée, dans deux lettres adressées à Clédonius (Lettres 101 et 102). Là encore, il a eu l'art de choisir les formules nettes qui serviront de canon à l'orthodoxie : « Deux natures : le Dieu et l'Homme, mais pas deux Fils » ; « Les réalités qui composent le Sauveur sont différentes, mais il ne s'ensuit pas qu'il y ait deux Sauveurs différents ; car les deux choses sont unes par le mélange qui les unit, Dieu s'humanifiant, l'Homme se divinisant. »
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Pierre HADOT : professeur au Collège de France
Classification
Autres références
-
SÉQUENCE DE SAINTE EULALIE
- Écrit par Bernard CERQUIGLINI
- 336 mots
La bibliothèque de Valenciennes conserve un manuscrit latin où l'on copia, sans doute à l'abbaye de Saint-Amand-les-Eaux dans la première moitié du ixe siècle, une traduction latine des œuvres de saint Grégoire de Nazianze. Ce manuscrit fut ensuite l'objet d'une double intervention...