GRENADE, Espagne
La Grenade nasride : la ville et l'Alhambra
Dès l'installation à Grenade du fondateur de la dynastie nasride, Mohammed al-Ahmar, la ville se modifia et prit la forme qu'elle conserva jusqu'à sa conquête par les Rois Catholiques, en 1492.
Afin d'accueillir les réfugiés, l'enceinte fut agrandie à l'ouest pour couvrir l'actuel quartier de l'Albaicín. La ville continuait de dominer la vallée du Genil, avec la vega d'où elle tirait, avec le meilleur de sa subsistance quotidienne, une partie de sa richesse.
Mais Mohammed al-Ahmar voulut suivre l'exemple qui avait été donné à Madinat az-Zahra par les califes de Cordoue, à Marrakech par les Almohades, et avoir à son tour une cité de gouvernement bien distincte de la ville commerçante. Il choisit pour la fonder l'étroit plateau allongé qui couronne la colline de la Sabika, où s'étaient déjà élevées de petites forteresses.
L' Alhambra formait une cité à part, dominant la ville proprement dite. C'était d'abord une vaste forteresse : un rempart flanqué de hauts bastions l'entourait ; à l'ouest s'élevait un puissant réduit : l'Alcazaba. Au nord s'étendaient les palais royaux : de leurs parties hautes on découvrait l'admirable panorama de la ville et de la vega. On accédait à l'Alhambra par des portes monumentales qui abritaient des passages à coudes multiples.
Alors que presque partout dans le monde musulman les palais anciens ont disparu ou ne sont plus que des ruines, l'Alhambra possède encore deux groupes de palais du xive siècle. Les demeures bâties par les premiers souverains de la dynastie ont disparu dès l'époque musulmane et, au xve siècle, les rois de Grenade n'ont pas eu – fort heureusement – les ressources nécessaires pour remplacer les palais que l'on admire aujourd'hui.
Comme toutes les grandes demeures hispano-mauresques, ceux-ci s'ordonnent autour de patios : l'élément premier n'est pas le corps de bâtiment, mais la cour, plus ou moins vaste. Les palais forment deux masses groupées autour de deux cours allongées dont les grands axes sont perpendiculaires. Le premier groupe, le cuarto de Comares, précédé d'un vestibule, d'un méchouar et d'un petit patio, est dû à Yusuf Ier (1332-1354) ; le second, le cuarto de los Leones, à Mohammed V (1354-1358 et 1368-1392). Une mosquée et des bains plus anciens raccordent ces deux ensembles. Les deux grands patios sont entourés de portiques ou de bâtisses sur leurs quatre côtés. Les salles de réception sont toujours au rez-de-chaussée, les pièces d'habitation, de dimensions beaucoup plus réduites, à l'étage. Ainsi, chacun de ces quartiers forme un petit monde fermé. Mais les parties hautes, situées loin des regards indiscrets, s'ajourent de baies et même de galeries ouvertes sur l'extérieur.
Au patio de Comares, appelé aussi de la Alberca ou des Myrtes, on saisit les procédés de composition des architectes grenadins : le centre de la cour est occupé par un grand bassin allongé que soulignent deux massifs de myrtes. Les bâtiments qui entourent ce patio s'ordonnent sur trois rythmes différents, dans un ensemble paradoxal qui oppose les pleins aux vides, les murs lisses aux colonnades, qui recherche la variété plus que l'unité, mais qui reste, dans son apparent déséquilibre, d'une science consommée.
La cour des Lions était, dans son état primitif, un jardin dont les axes étaient marqués par deux allées se coupant à angle droit avec, à leur croisée, la fontaine des Lions. Quatre kiosques saillants, reliés par des portiques, occupent le milieu des côtés. Pavillons et galeries sont faits de minces colonnettes disposées suivant des rythmes changeants et subtils. La cour des Lions est flanquée de quatre salles de dimensions et de formes inégales, mais[...]
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Écrit par
- Robert FERRAS : agrégé de géographie, docteur ès lettres, professeur des Universités
- Henri TERRASSE : membre de l'Institut
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