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GRECQUE GUERRE DE L'INDÉPENDANCE (1821-1830)

Issue de trois révoltes au sein de l'Empire ottoman d'Europe (celle des principautés danubiennes, celle d'Ali pacha de Ioannina et de celle du Péloponnèse et de Stéréa Hellade), la guerre de l'Indépendance grecque est encore un phénomène très controversé.

Différents facteurs y interviennent de façon déterminante : l'engouement de l'Occident pour la Grèce faisait partie des modes, comme celle de la Chine ou du Japon et plus tard celle de l'art nègre, qui précédaient les assauts expansionnistes des impérialismes européens. À cela s'ajoute l'implantation de l'idée de la « Renaissance grecque » dans certaines couches citadines grécophones de l'Empire ottoman, idée qui se lie à toute une série de tendances centrifuges, comme celles qui lièrent au catholicisme occidental les Arméniens, les Coptes et les Pauliciens de Bulgarie, comme encore celles qui lièrent les slavophones à la Russie. Le mythe de la Grèce ne fut, en fin de compte, qu'un ciment qui assemblait tant bien que mal des particularismes culturels, des intérêts économiques et des tendances politiques contradictoires. Conçue par des intellectuels anticléricaux, influencés par la Révolution française (le groupe de Rhigas Velestinlis), l'idée de la révolution grecque fut répandue par une société secrète composée de partisans modérés de la Révolution française et d'ecclésiastiques « modernistes » (Filiki Etéria), adversaires de l'Église orthodoxe officielle ; elle fut mise en œuvre par des éléments de la haute administration ottomane (phanariotes), favorables à l'idée russe de la création d'un nouvel Empire byzantin et d'un « front panorthodoxe » en Orient. Elle rallia : les gros propriétaires fonciers désireux de remplacer définitivement le système ottoman des fiefs militaires par celui de la pleine propriété foncière, privée et transmissible héréditairement ; des armateurs, anciens corsaires des îles de l'archipel, enrichis par le Blocus continental et désireux de se créer une base étatique à leur solde, qui leur procurerait facilités et exonérations fiscales ; des ligues tribalo-claniques locales, qui voulaient préserver des privilèges d'autogestion qu'un courant centraliste et moderniste ottoman tentait d'abolir à la fin du xviiie et au début du xixe siècle.

À ses débuts la révolution eut trois foyers dont chacun appartenait à une tendance différente : celui des principautés danubiennes (1820-1821), avec à sa tête le prince Alexandre Ypsilanti, officier de l'armée tsariste, qui appartenait à la tendance « panorthodoxe » ; ce mouvement fut écrasé, abandonné volontairement par la Russie, parce qu'il était truffé de partisans des idées de la Révolution française et d'adversaires de l'absolutisme tsariste. Celui d'Ali Pacha de Ioannina (1820-1821), partisan de la propriété privée transmissible héréditairement, fut abandonné à son sort et écrasé par l'armée ottomane, car les armateurs des îles de l'archipel ne voulaient en aucune façon que les propriétaires fonciers représentent la force principale au sein du nouvel État. Enfin, le foyer du Péloponnèse et de la Stéréa Hellade (1821-1829) fut celui des ligues tribalo-claniques de ces régions, désireuses de sauvegarder leurs privilèges menacés, et des armateurs avides de nouveaux privilèges.

Les deux premiers foyers éteints, les survivants allèrent vers le troisième et s'efforcèrent de donner à la révolution leur propre orientation, ce qui donna lieu aux sanglants conflits de 1823-1825. Les particularismes locaux ne permettant pas à toutes les ligues tribalo-claniques, et donc aux principaux effectifs militaires de la révolution, de s'unir, chaque force put recruter parmi les premières et constituer sa propre milice. Finalement, un compromis[...]

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