GUERRE FROIDE
Le dégel
La mort de Staline et l'armistice de Corée
Le dictateur soviétique succombe, le 5 mars 1953, à une congestion cérébrale. Une « troïka » de trois membres – Malenkov, dauphin désigné, Molotov, chef de la diplomatie, et Beria, chef de la police – s'installe au pouvoir. Son premier souci est de détendre la situation, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur. D'où les décisions prises en faveur de l'armistice, de la baisse des prix, de la reprise des relations avec la Yougoslavie et des négociations de Corée. L'armistice est enfin conclu le 27 juillet après une guerre qui avait fait des centaines de milliers de victimes.
Ce « dégel » va-t-il permettre d'en finir avec la guerre froide ? Churchill, redevenu Premier ministre l'année précédente, Eisenhower qui vient de succéder à Truman multiplient les déclarations favorables à la négociation avec l'Est, deux problèmes devant être réglés en priorité, ceux de l'Allemagne et de l'Indochine.
Des incidents entre ouvriers et policiers est-allemands survenus à Berlin en juin 1953 soulignent la gravité du premier de ces problèmes. Ils coûtent sa place – et la vie – à Beria, accusé non seulement d'avoir été responsable en tant que chef de la police stalinienne d'innombrables violations de la légalité, mais d'avoir voulu abandonner le socialisme en Allemagne. Ce dernier grief sera repris beaucoup plus tard par Nikita Khrouchtchev contre Malenkov. Lui-même sera renversé quelques jours après avoir annoncé son intention de se rendre à Bonn.
En tout cas, les dirigeants du Kremlin n'entendent pas payer une éventuelle neutralisation de l'ancien Reich de l'abandon du système communiste en Allemagne de l'Est. La conférence des ministres des Affaires étrangères qui se déroule à Berlin en janvier-février 1954 ne peut pour cette raison parvenir à aucun résultat. À défaut d'accord sur l'Allemagne, les Quatre s'entendent pour convoquer à Genève, en mai de la même année, une conférence destinée à régler les problèmes coréen et indochinois.
Les accords de Genève et la fin de l'armée européenne
Sur le problème coréen, les débats de cette rencontre tournent court rapidement. Il n'en va pas de même de la négociation sur l'Indochine, qui s'ouvre en mai à Genève dans un climat dramatique ; le camp retranché de Diên Biên Phu est tombé la veille après un terrible siège. Quelques jours plus tôt, les États-Unis ont rejeté une requête de Paris tendant à faire exécuter par leur aviation un raid contre les assaillants ; ils ne peuvent s'opposer à l'armistice conclu le 20 juillet par Pierre Mendès France, devenu le mois précédent président du Conseil. Le Vietnam est provisoirement partagé entre le Viêt-minh au Nord et, au Sud, le gouvernement pro-américain de Ngô Dinh Diem, qui refuse d'approuver les accords. La déclaration finale, non signée, de la conférence prévoit que des élections auront lieu dans un délai de deux ans pour réunifier le pays. Le Cambodge et le Laos se voient en fait neutralisés. En 1956, le refus de Saigon de procéder aux élections entraînera rapidement une reprise des hostilités, dans lesquelles les États-Unis vont se trouver impliqués, au point d'y envoyer, en 1968, jusqu'à 520 000 hommes et d'écraser le Vietnam du Nord sous les bombes.
Dans la foulée du succès que lui vaut l'armistice, Mendès France s'attaque au dossier de l'armée européenne. Il élabore un compromis destiné à mettre d'accord partisans et adversaires du projet, mais ne réussit pas à y rallier les autres gouvernements signataires. Après l'échec d'une conférence tenue à Bruxelles, l'Assemblée nationale rejette le traité, le 30 août 1954. Il s'ensuit une phase de vive tension entre la France et ses alliés, à laquelle met fin,[...]
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Écrit par
- André FONTAINE
: ancien directeur du journal
Le Monde
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