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GUERRE

Les règles particulières aux diverses formes de guerre

Outre le droit général de la guerre, des règles particulières ont été établies, concernant les différentes formes de belligérance. À l'étonnement du profane, la guerre maritime a fait l'objet de règlements plus contraignants que la guerre terrestre. Plus récemment, la question s'est posée de préciser un droit de guerre aérienne, puis de guerre atomique.

La guerre maritime

Navires de commerce

Même durant la longue période où la plupart des États s'abstenaient de saisir sur terre les biens ennemis, il était d'usage de confisquer immédiatement tout navire de commerce battant pavillon ennemi qui se trouvait dans un port au moment où éclataient les hostilités. Ce fut seulement à l'occasion de la guerre de Crimée (1853-1856) que s'introduisit la pratique d'accorder un délai de grâce pour le déchargement et le départ. Cette concession en faveur de l'intérêt général du commerce maritime fut reprise au cours des principales guerres qui suivirent, jusqu'à la guerre russo-japonaise inclusivement, bien que la Russie ait alors réduit le délai à quarante-huit heures.

À la conférence de La Haye de 1907, certains juristes s'efforcèrent de rendre obligatoire ce que les principales puissances maritimes considéraient encore comme une mesure de faveur. Devant l'opposition de la France, de la Grande-Bretagne et du Japon, soutenus par l'Argentine, il fallut s'en tenir à un compromis qui laissait prévoir une régression par rapport à la pratique libérale des cinquante années précédentes ; comme bâtiments de guerre d'appoint ou comme moyens d'approvisionnement des formations navales, les navires de commerce devenaient des éléments importants du potentiel militaire. La Grande-Bretagne notamment réclamait avec insistance que la saisie ou l'autorisation de partir fût laissée à l'appréciation des gouvernements, en fonction des circonstances. Le texte de la sixième convention de La Haye, article 1er, déclarait « souhaitable » que les navires de commerce soient autorisés à partir librement. Cette déclaration soumettait en fait entièrement la question à l'appréciation du belligérant. Les articles 2 et 3, d'autre part, interdisaient catégoriquement la confiscation de tout navire de commerce ennemi se trouvant dans l'impossibilité de partir dans les limites du délai de grâce ou « rencontré en haute mer, alors qu'il ignorait encore l'ouverture des hostilités ».

Ces trois articles furent mis à rude épreuve durant la Première Guerre mondiale. Certains belligérants accordèrent immédiatement des délais de grâce. D'autres, comme la Grande-Bretagne, autorisèrent le départ, à condition de recevoir l'assurance qu'il en serait de même pour leurs propres bâtiments.

À vrai dire, le fait que certaines puissances belligérantes n'avaient pas ratifié la convention la rendait inapplicable, conformément à l'article 6 de la convention elle-même. Mais le comité judiciaire du Conseil privé, sur appel du Conseil des prises, fut d'avis qu'elle était valable, par accord implicite entre la Grande-Bretagne et l'Allemagne. Les navires non autorisés à partir lorsque éclata la guerre ne furent donc pas confisqués. Mais comme la pratique internationale en la matière était restée incohérente, le gouvernement britannique dénonça la convention en 1925.

En septembre 1939, un bâtiment allemand, le Pomona, fut saisi dans le port de Londres immédiatement après l'entrée en guerre de la Grande-Bretagne. Le Conseil des prises estima qu'il n'existait nulle règle de droit coutumier international interdisant la confiscation et que, la sixième convention de La Haye ayant été dénoncée, la Couronne pouvait saisir le bâtiment sans compensation. Le conseil des prises de Hambourg rendit une[...]

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Écrit par

  • : membre de l'Institut, professeur émérite à l'université de Paris-IV-Sorbonne
  • : auteur de Law in Diplomacy
  • : professeur à l'Institut universitaire de hautes études internationales, Genève
  • : emeritus professor of international law, université de Chicago

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Médias

Premiers canons - crédits : British Library/ AKG-images

Premiers canons

Destruction de l'aviation égyptienne au début de la guerre des Six Jours - crédits : Central Press/ Getty Images

Destruction de l'aviation égyptienne au début de la guerre des Six Jours

Pacte Briand-Kellogg - crédits : Keystone/ Getty Images

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