Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

GUIGUES LE CHARTREUX (1083-1136)

Né à Saint-Romain, dans le diocèse de Valence, Guigues est le cinquième prieur de la Chartreuse. Saint Bruno, qui avait fondé la Chartreuse en 1084, l'avait quittée pour Rome en 1088 et était mort en Calabre en 1101. Guigues ne le rencontra donc jamais, mais, quand il entra lui-même à la Chartreuse en 1106, il trouva des moines qui avaient connu le fondateur. En 1109, il fut élu prieur et il le resta jusqu'à sa mort.

Sans quitter la Chartreuse et en y vivant en solitaire, Guigues acquit une grande renommée d'intelligence, de savoir et de piété. Ses lettres témoignent de sa sagesse et de l'étendue de ses relations. Elles sont adressées au pape Innocent II, au cardinal Aimeric, chancelier de la Sainte Église romaine, à l'archevêque Rainaud de Reims, à l'abbé de Cluny, Pierre le Vénérable, à Hugues de Payns, grand maître des Templiers, au duc d'Aquitaine, Guillaume X. L'abbé de Clairvaux, saint Bernard, l'honorait de son amitié.

Au début de son priorat, Guigues composa un recueil de pensées ; à la fin, il écrivit la Vie de l'évêque saint Hugues de Grenoble (mort en 1132) qui, non content d'avoir installé saint Bruno et ses compagnons à la Grande-Chartreuse, s'était toujours montré l'ami et le protecteur des ermites. Cependant, le principal titre de gloire de Guigues est d'avoir rédigé, vers 1125, les Coutumes de la Chartreuse. L'attrait pour la vie érémitique était alors général. Trois prieurs d'ermitages établis dans le Bugey, à Portes, à Meyriat et à Saint-Sulpice, demandèrent à Guigues de leur faire connaître l'ordonnance de la vie de la Chartreuse. Bien qu'il ne soit pas nommé dans la lettre d'envoi, l'intervention de Pierre le Vénérable, qui connaissait personnellement les trois prieurs et Guigues lui-même, ne paraît pas douteuse. Guigues décrivit la vie de la Chartreuse : les quarante et un premiers chapitres sont consacrés aux moines, les chapitres xlii à lxxvi aux « laïques qu'on appelle convers », les chapitres lxxvii à lxxix contiennent des prescriptions communes, le chapitre lxxx et dernier est un éloge de la vie solitaire. Les Coutumes de Guigues sont certainement un des plus remarquables textes monastiques de tous les temps. Guigues a codifié les usages suivis depuis saint Bruno en précisant et modifiant ce qui devait l'être. Les Coutumes sont restées à la base de la législation cartusienne ; mais elles perdirent de leur fraîcheur première, quand elles furent retouchées pour former en 1259 le fond des Statuta antiqua, eux-mêmes refondus en 1582 pour devenir la Nova Collectio statutorum.

Le 30 janvier 1132, une avalanche écrasa les bâtiments de la Chartreuse, tuant six moines, soit la moitié de l'effectif. Bien qu'âgé de moins de cinquante ans, Guigues était déjà accablé d'infirmités. Il mourut quatre ans après le désastre. La restauration devait être l'œuvre de saint Anthelme.

— Jacques DUBOIS

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : moine bénédictin, directeur d'études à l'École pratique des hautes études (IVe section)

Classification

Autres références

  • CHARTREUX

    • Écrit par et
    • 1 505 mots
    • 1 média
    Un moment abandonné, en 1090, l'ermitage de la Grande-Chartreuse fut réoccupé par des disciples de Bruno. Guigues, né en 1083, entré en 1106 à la Grande-Chartreuse, dont il devint le cinquième prieur en 1109, rédigea vers 1125 les premières Coutumes, qui sont un code de vie monastique aussi intéressant...