GUILLAUME LE TACITURNE (1533-1584)
Entre catholiques et protestants
Dans ces provinces, non seulement l'absolutisme espagnol brime les libertés séculaires, mais il lie aux destinées d'un empire étranger un ensemble de territoires que les ducs de Bourgogne ont habitué à une grande autonomie. Guillaume est donc assuré d'être suivi par ses sujets en s'opposant au principal agent de cet absolutisme, le cardinal Granvelle, président du Conseil d'État et très écouté de Marguerite de Parme, la nouvelle gouvernante des Pays-Bas. Veuf d'Anne van Buren, morte en 1558, il épouse en 1561 Anne de Saxe, fille de l'Électeur Maurice, un des champions de la Réforme. Il n'a pu réaliser cette alliance qu'en donnant des assurances de fidélité à la fois à l'Électeur et à l'Espagne, double jeu qui le montre sous un jour assez peu favorable.
Après le départ de Granvelle, obtenu grâce à Guillaume, Philippe II va-t-il infléchir sa politique autoritaire ? Il n'en est rien : devant les progrès du luthéranisme aux Pays-Bas, le roi décide une action vigoureuse, avec le concours de l'Inquisition. Les représentations du Conseil d'État en faveur de la liberté de conscience restant vaines, Guillaume soutient une pétition de la petite noblesse à la gouvernante, au cours d'une campagne qui exacerbe les antagonismes comme en témoigne la « fureur iconoclaste ». En 1566, un « compromis des Nobles » est signé à Breda par les partisans de la Réforme – dans le sens d'une large tolérance. Il est remarquable qu'à cette époque le prince réagit contre les violences des iconoclastes. Dans un engagement, près d'Anvers (vers 1567), il laisse même écraser les calvinistes par les troupes de la régente. On conçoit l'embarras de Guillaume : les calvinistes constituent une minorité trop souvent brutale, socialement inquiétante. Prendre ouvertement parti pour eux risque à la fois de briser le sentiment d'unité nationale des Pays-Bas, et de susciter une terrible répression. De fait, le trouble des esprits favorise les réactions du gouvernement, et Guillaume, menacé, gagne Dillenburg en résignant ses fonctions (avril 1567).
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Écrit par
- Maurice BRAURE : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Bordeaux
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
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