STRÄNG GUNNAR (1906-1992)
Né à Järfälla le 23 décembre 1906 et mort à Stockholm le 7 mars 1992, Gunnar Sträng a été un des principaux acteurs de la vie politique suédoise de l'après-guerre.
C'est en particulier comme ministre des Finances, de 1955 à 1976 dans les cabinets conduits par les sociaux-démocrates Tage Erlander puis Olof Palme, qu'il a largement contribué à l'édification de l'État-providence suédois.
Issu du prolétariat rural, il commença à travailler dès l'âge de douze ans comme ouvrier agricole. Après avoir adhéré au mouvement de jeunesse social-démocrate, il s'engagea dans la voie syndicale et fut élu à la présidence de la Fédération des ouvriers agricoles en 1938. Membre du comité directeur de la Confédération générale des syndicats (L.O.) au cours de la Seconde Guerre mondiale, il entra en 1945 dans le cabinet social-démocrate de Per Albin Hansson comme ministre sans portefeuille. Ministre du Ravitaillement en 1947-1948, de l'Agriculture de 1948 à 1951 et des Affaires sociales de 1951 à 1955, il succéda à Per Edvin Sköld aux Finances. Ce poste devait être, tout autant que la chancellerie, le centre réel du pouvoir pendant deux décennies. Gunnar Sträng, qui avouait n'avoir jamais lu Marx, avait opté très tôt pour le réformisme, qui lui paraissait la seule méthode d'émancipation de la classe ouvrière suédoise. S'il existe un « modèle suédois » d'organisation sociale, il est en grande partie l'œuvre de Gunnar Sträng, même si ses prédécesseurs, après que la social-démocratie eut pris le pouvoir en 1932, avaient ouvert la voie dans bien des domaines. L'idéal de cette œuvre semble avoir été la réduction des inégalités socio-économiques et l'établissement d'une « sécurité » pour tous, et ses instruments une politique de plein emploi et une fiscalité progressive, il est vrai de plus en plus lourde, puisqu'elle atteignait plus de 48 p. 100 du P.N.B. en 1976.
Dès 1955, l'assurance-maladie fut rendue obligatoire pour tous les Suédois. Mais c'est surtout la réforme de la pension professionnelle complémentaire (A.T.P.) qui fut la grande affaire des années 1950 (1957-1960) pour Gunnar Sträng et pour le ministre des Affaires sociales Torsten Nilsson. Alors que la pension de base (folkpension) était financée à 70 p. 100 par l'État et les communes, l'A.T.P. devait l'être à plus de 80 p. 100 par les cotisations patronales. En assurant progressivement aux retraités une pension globale équivalant à 65 p. 100 au moins du revenu moyen de leurs quinze meilleures années, les sociaux-démocrates avaient le sentiment de faire œuvre de justice sociale, et le ministre des Finances appréciait avec réalisme ce que l'augmentation de la consommation apporterait à la croissance. La politique du « bien-être » fut poursuivie pendant toutes les années 1960, apportant une quatrième semaine de congés payés dès 1964, une augmentation sensible des pensions et des allocations familiales en 1965 et des indemnités de maladie en 1966.
En s'efforçant d'accompagner par une politique de plein emploi sans inflation la croissance d'une économie de libre entreprise, Gunnar Sträng contribua à faire des années 1950 et 1960 un relatif âge d'or. Au début des années 1970, le P.N.B. cessa cependant de croître et le chômage apparut. Les sociaux-démocrates rencontrèrent de sérieuses difficultés aux élections législatives de 1970 et de 1973. Les dernières années de Gunnar Sträng à la tête de l'Économie et des Finances de son pays furent assombries par la crise mondiale et la montée de la récession. Après la défaite électorale des sociaux-démocrates en 1976, Gunnar Sträng se retira de la vie politique active.
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Écrit par
- Jean-Pierre MOUSSON-LESTANG : professeur émérite d'histoire contemporaine à l'université Robert-Schuman, Strasbourg
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