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VAN SANT GUS (1952- )

Une esthétique post-moderne

Comme Gerry, Elephant s’inspire d’un fait réel : la tuerie du lycée de Columbine à Littleton en 1999, au cours de laquelle deux élèves abattirent une quinzaine de leurs condisciples et professeurs. Gus Van Sant ne cherche pas à percer les motivations des adolescents tueurs, même si le film donne prise, au passage, à telle ou telle explication sociologique, économique, politique ou psychanalytique de l’événement. Van Sant fait bel et bien œuvre de cinéaste et de plasticien. Loin d’atténuer l’horreur du massacre de Columbine, la vision froide d’Elephant, souvent en longs plans-séquences qui épousent le rythme et le mouvement des tueurs, à égalité avec les victimes et les survivants, ajoute l’indifférence à l’atrocité. L’esthétique post-moderne de Van Sant reçoit une approbation exceptionnelle avec un doublet inédit à Cannes : palme d’or et prix de la mise en scène.

Last Days (2005) connaît un impact moins universel qu’Elephant, même si le cinéaste y reconstitue les derniers jours d’une star du rock avant son suicide, le chanteur du groupe Nirvana Kurt Cobain. Les faits se suivent sans s’enchaîner, sans hiérarchie, n’empêchant pas l’interprétation mais ne permettant nullement d’éclaircir les raisons du suicide du chanteur. On peut appliquer à Last Days le commentaire du philosophe Jacques Rancière sur Elephant : « Il n’y a pas de raison au crime, sinon le vide même des raisons. La mise en scène est la longue manifestation de ce vide. »

Avec Last Days, dernier élément de ce qu’il est de coutume d’appeler sa « trilogie de la mort », Gus Van Sant paraît être allé au bout d’une certaine recherche formelle, d’une distanciation à l’égard d’actes dotés d’une grande charge affective. Mais ses préoccupations profondes demeurent : l’exploration de l’imaginaire adolescent et l’approche de la mort. Paranoid Park (prix du 60e anniversaire au festival de Cannes 2007) est précisément l’histoire d’un adolescent, Alex (Gabe Nevins), confronté à la mort particulièrement horrible d’un vigile du Paranoid Park de Portland, consacré au skateboard. Alex est partagé entre un intérêt certain pour l’événement et une certaine distance, refus ou absence d’affect. Le film se présente comme un immense flash-back vécu dans une sensation de flottement, comme en apnée, illustrant la confession qu’écrit Alex, effectivement responsable de la mort du vigile, afin de se débarrasser d’un souvenir embarrassant. En détruisant ces quelques pages, il peut de nouveau se livrer librement à sa passion sportive. La photographie de Christopher Doyle épouse les mouvements acrobatiques des skateboarders avec force ralentis. À la manière d’un commentaire, la musique mixe Beethoven, hip-hop, rock et Nino Rota, dont Amarcord (« je me souviens »). Mais à l’arrivée, Alex ne peut plus se souvenir. Il ignore Dostoïevski et Raskolnikov, dans un monde sans Dieu où n’existent ni mal, ni crime, ni culpabilité, ni sanction…

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Écrit par

  • : critique et historien de cinéma, chargé de cours à l'université de Paris-VIII, directeur de collection aux Cahiers du cinéma

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  • ELEPHANT (G. Van Sant)

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    Réalisateur singulier, Gus Van Sant débuta au milieu des années 1980, avec des films longtemps restés inédits en France (MalaNoche, 1985). Également peintre, musicien et photographe, il a élu domicile à Portland, dans l'Oregon. C'est dans cette ville qu'il situe l'action de la plupart de ses films....

  • ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE (Arts et culture) - Le théâtre et le cinéma

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    Bien plus surprenantes sont les différences que l'on perçoit dans les œuvres deGus Van Sant, entre des films aussi remarquables que My Own Private Idaho (1991) ou Prête à tout (1995), qui impose la star Nicole Kidman, et Psycho (1998), un remake aussi navrant qu'inutile du film d'Hitchcock. Arrive...