KLIMT GUSTAV (1862-1918)
Gustav Klimt constitue un cas particulier parmi les artistes du xxe siècle, qui a très longtemps dérouté les historiens d'art, tant son parcours, son œuvre et sa réception sont atypiques. Peintre connu pour ses décorations murales néoclassiques à ses débuts, il se détourna rapidement du style académique qui faisait son succès pour devenir l'un des fondateurs de la Sécession viennoise. Bientôt érigé au statut de « mentor » de la modernité en Autriche, il choqua les conservateurs et fut porté au pinacle par les jeunes artistes avides d'un renouveau. Sa notoriété était alors si emblématique que le tournant du siècle en Autriche, cet âge d'or de la créativité et de la culture, aussi bref qu'intense, fut baptisé « l'âge de Klimt ».
La redécouverte d'une œuvre
Pourtant l'étoile du peintre ne cessa de pâlir après sa mort. Son œuvre, jugée après guerre décorative et passéiste, sinon comme l'expression étrange d'un symbolisme au goût douteux, endura un long purgatoire. La première monographie consacrée au peintre paraît en 1967. La véritable redécouverte de Klimt se fit cependant à partir des années 1980, dans le sillage des travaux sur la Vienne du début du xxe siècle et de la réévaluation de l'Art nouveau. Depuis lors, son prestige n'a cessé de croître et l'enthousiasme que suscite aujourd'hui son œuvre est proportionnel à l'indifférence ou au dédain qu'elle rencontra cinquante ans durant. Certains de ses tableaux sont devenus de véritables icônes dont les motifs sont déclinés à satiété sur des affiches publicitaires, des bijoux et des vêtements à la mode. En 2006, un tableau de Klimt (Adèle Bloch-Bauer, 1907) a pulvérisé en vente publique le record jamais atteint par une œuvre d'art. On peut toutefois s'interroger sur cet engouement. Ne serait-il pas dû aux mêmes mauvaises raisons qui ont si longtemps occasionné son rejet ? L'œuvre de Klimt, clinquante et superficielle en apparence, est infiniment plus subtile et complexe qu'il n'y paraît. L'éclat de l'or a fini par obscurcir l'intelligence de l'œuvre, aussi souvent reproduite que peu étudiée, comme si la puissance de l'image anesthésiait l'analyse. Il reste à découvrir Klimt derrière le décor. Un artiste qui défie les classifications trop rigides et les interprétations hâtives. Une œuvre à la fois hédoniste et inquiète, flatteuse et provocatrice, contemporaine et intemporelle, réaliste et abstraite. Une peinture pétrie de références, qui recourt aux emprunts, aux citations, pour mieux les détourner et les juxtaposer dans une configuration entièrement nouvelle. Une peinture composite, allusive, ambiguë, énigmatique même, sous son apparente simplicité, aux antipodes d'une certaine forme univoque et cohérente de la modernité. Voilà sans doute pourquoi il fallut attendre si longtemps avant que la peinture de Klimt ne soit redécouverte, appréciée et comprise.
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Écrit par
- Yves KOBRY : critique d'art, historien d'art
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