LE BON GUSTAVE (1841-1931)
Sociologue français, célèbre par l'intérêt qu'il porta à la « psychologie des foules ». Gustave Le Bon fut un esprit universel et un polygraphe abondant. De formation médicale, il se distingua dans les ambulances mobiles en 1870, publia des travaux sur le choléra, sur la mort apparente, sur l'hygiène du soldat, sur l'asphyxie ; puis il se tourna vers l'anthropologie et fut chargé en 1884 d'une mission d'archéologie aux Indes. Il fonda chez Flammarion la célèbre Bibliothèque de philosophie contemporaine, dans laquelle il allait publier désormais la plupart de ses œuvres ; celles-ci portent, d'un côté, sur la politique et ce qu'on appellera bientôt la sociologie, ou la psychologie sociale, et, d'un autre côté, sur la physique théorique, science à laquelle Le Bon s'adonne à partir de 1896 ; ses recherches, conduites dans un laboratoire privé, furent en général mal accueillies par les savants de l'époque ; elles contiennent pourtant des intuitions intéressantes sur les rapports entre la matière et l'énergie.
D'une œuvre écrite considérable, sans cesse rééditée du vivant de l'auteur et traduite en une douzaine de langues, on retiendra : Traité de physiologie humaine (1875) ; Histoire des origines et du développement de l'homme et des sociétés (1877) ; L'Homme et les sociétés (1880) ; La Civilisation des Arabes (1883) ; Les Civilisations de l'Inde (1887) ; Les Premières Civilisations (1889) ; Lois psychologiques de l'évolution des peuples (1894) ; La Psychologie des foules (1895) ; Psychologie du socialisme (1898) ; L'Évolution de la matière (1905) ; La Psychologie politique et la Défense sociale (1910) ; Les Opinions et les Croyances (1911) ; La Révolution française et la psychologie des révolutions (1912).
La Psychologie des foules est considérée aujourd'hui par les psychosociologues comme l'œuvre d'un précurseur à la fois génial et naïf. On y montre, pour la première fois semble-t-il, que la « foule » engloutit l'individu, qu'elle est émotive, « féminine », impulsive, dangereuse, crédule. La contagion mentale est à l'origine de cette entité, dont il faut prévoir l'influence grandissante, car nous allons entrer dans l'« ère des foules ». La même contagion mentale est, avec l'hérédité, à la base des peuples, races et civilisations, lesquels ont une « âme collective » plus valable que celle qui est propre aux foules, car d'elle émanent lois et normes.
On a reproché à ces analyses un sectarisme conservateur, et aussi un confusionnisme, car Le Bon étend le concept de foule à des groupements qu'il n'aime pas mais qui ne sont pas des foules pour le sociologue, tels un jury ou un parlement (les « assemblées » sont suggestibles). Gabriel Tarde, qui poursuivait à la même époque des recherches parallèles, fut très sévère envers Le Bon et consacra à la critique de ce dernier son dernier ouvrage (L'Opinion et la Foule, 1901). Freud, en revanche, malgré quelques réserves, commence par une étude attentive des positions de Le Bon sa Psychologie collective et analyse du moi (1921) : « Par l'accent qu'elle met sur le rôle inconscient de la vie psychique, la psychologie de M. Le Bon se rapproche considérablement de la nôtre. »
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Écrit par
- Georges TORRIS : docteur en médecine et en philosophie
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