HABITAT L'habitat rural en Occident (XIe-XIXe s.)
Prémices des architectures rurales traditionnelles du XIIe au XVe siècle
L'un des caractères les plus frappants de la première phase de constitution de l'architecture européenne, dans la période allant du xiie au xve siècle, est d'abord l'utilisation de plus en plus courante de matériaux plus solides, plus élaborés, de plus en plus fréquemment produits par des artisans spécialisés. L'un des aspects les plus classiques de ce phénomène est l'emploi de la .pierre .
Ce serait une erreur de croire que pour l'habitat rural antérieur aux xiie et xiiie siècles on n'employait jamais la pierre : diverses zones méditerranéennes de l'Europe ou de la France, certains secteurs septentrionaux sont là pour prouver le contraire. Mais ce qui est frappant et nouveau dans cette période, c'est d'abord l'abandon, dans des régions données, de l'infraconstruction des périodes antérieures, avec les caractères évoqués plus haut, au profit d'une architecture de pierre ; c'est ensuite le caractère, assez courant dans l'Europe du Nord-Ouest, de cette évolution au xiie et surtout au xiiie siècle.
Dans des habitats où la fouille et le hasard des périodes d'occupation permettent de suivre les matériaux de construction utilisés sur une période assez longue – disons du xe ou du xie siècle au xiiie ou xive –, c'est en effet à cette époque – fin xiie-courant xiiie siècle – que l'on observe ce changement, et cela aussi bien en Grande-Bretagne, dans de nombreux sites, qu'en Allemagne et très vraisemblablement en France. L'emploi plus courant de la pierre signifie beaucoup de choses : l'obtention du matériau, son transport, sa mise en œuvre supposent plus de temps et d'efforts que l'infraconstruction des époques antérieures. Même si le niveau des connaissances techniques nécessaires au bâtisseur reste globalement équivalent dans l'un et l'autre cas, l'outillage indispensable (instruments de transport, outils métalliques) est certainement plus important dans la construction en pierre. Enfin, le produit obtenu, la maison, a changé de nature : il devient une bâtisse « lourde », stable, permanente, transmissible pendant quelques générations et abritant par conséquent une famille. Une mentalité nouvelle, une forme nouvelle de relation entre les humains et leur maison apparaît alors.
Il ne faudrait cependant pas croire que cette évolution de mentalité se concrétise uniquement par l'emploi de la pierre : d'autres matériaux, diverses évolutions techniques interviennent en même temps dans le même sens. À partir du xiie ou xiiie siècle, en Flandre notamment, la brique apparaît et elle commence, après le xiiie siècle essentiellement, de se diffuser dans l'habitat rural. Les matériaux de couverture en terre cuite sont produits dans des ateliers pendant la même période. Leur fabrication se développe ensuite rapidement, marquant aussi une rupture considérable que les fouilles archéologiques permettent aisément de constater.
Dès le xiiie ou xive siècle apparemment, la frontière si classique et si perceptible de nos jours encore entre France de la tuile plate et France de la tuile creuse existe déjà, peut-être avec d'autres tracés mais dans tous les cas avec le même contraste entre le Nord et le Sud. La tuile, qui se substitue ordinairement à des matériaux végétaux, est l'expression concrète de l'introduction dans l'habitat rural non seulement de matériaux plus solides, plus permanents, mais surtout de matériaux produits par des artisans spécialisés qui les vendent à la paysannerie : le phénomène est d'autant plus important qu'il va de pair avec d'autres innovations comparables dans d'autres secteurs, et tout spécialement dans la charpente.
Avant le xie siècle, l'archéologie[...]
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Écrit par
- Jean CHAPELOT : directeur de recherche au C.N.R.S.
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