HALTE À LA CROISSANCE ?, Club de Rome
Le premier rapport du Club de Rome, intitulé The Limits to Growth (traduit en français sous le titre Halte à la croissance ?) et publié en 1972, remettait en cause le rêve d'une croissance économique sans fin. Amorcé par Thomas Malthus et son fameux « Principe de population » paru en 1798, ce débat était relancé. Dennis H. Meadows et ses collaborateurs, chercheurs au Massachusetts Institute of Technology (M.I.T.) et auteurs de ce rapport, dans le sillage des travaux de Jay Forrester, s'appuyaient sur une modélisation mathématique de l'écosystème mondial pour tirer le signal d'alarme : nous vivons dans un monde fini.
Le modèle utilisé pour simuler la dynamique de notre monde et explorer son futur intégrait cinq variables fondamentales : les ressources alimentaires ; les ressources naturelles non renouvelables telles que le pétrole, le charbon, les métaux ; la production industrielle et l'évolution du capital productif ; les niveaux de pollution et leurs conséquences pour l'environnement ; la population mondiale.
Quant aux conclusions dégagées, les voici résumées :
– si les rythmes observés de croissance démographique, de surconsommation des ressources et de pollutions se poursuivent, les limites à la croissance seront atteintes dans le prochain siècle avec pour résultat un déclin incontrôlable des conditions de vie et de notre capacité industrielle ;
– il est possible de corriger cette dérive et de s'orienter vers des conditions de développement écologiquement soutenables ;
– si la population humaine opte pour cette dernière solution, plus tôt elle le fera, plus grandes seront les chances de succès.
Ce livre choc fut sévèrement critiqué. Outre qu'il prétendait empêcher de « croître en rond » (motif inavoué de son rejet), il sous-estimait le rôle d'innovations technologiques possibles et ignorait le mécanisme des prix dans les rétroactions prévues dans les modèles utilisés.
Quarante ans après, tout cela paraît fort bien vu. Alors pourquoi ces sages recommandations n'ont-elles pas été entendues ? N'est-ce pas le même propos qu'à repris et solidement étayé le Millennium Ecosystem Assessment (2005), une étude sur l'évaluation des écosystèmes de la planète qui a montré que plus de 60 p. 100 des services rendus par les écosystèmes sont dégradés ou surexploités, avec un risque d'aggravation aiguë dans les décennies à venir ? N'est-ce pas le même message qu'a répété la crise financière et sociale survenue en 2008 ?
Mais le sentiment qu'il y a urgence à réfléchir à la transition vers une économie durable paraît s'imposer : une prospérité sans croissance serait possible. La question naguère posée par le club de Rome devient donc : quelle sorte de croissance ou de développement devons-nous chercher ?
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Écrit par
- Robert BARBAULT : professeur à l'université de Paris-VI-Pierre-et-Marie-Curie, directeur du département écologie et gestion de la biodiversité, Muséum national d'histoire naturelle, Paris
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