HANOÏ
La capitale du Vietnam est située au centre du réseau hydrographique du Nord, entre la zone de convergence du Song Da, du Song Lô et du fleuve Rouge et de divergence du delta, qui, par le Song Duong et par le fleuve, permet de gagner le littoral. Elle s'est inscrite, à la période précoloniale comme coloniale, dans l'un des premiers casiers hydrauliques en tête de delta, délimité par les digues qui bordent le fleuve à l'est et le Song To Lich à l'ouest. Les levées alluviales du fleuve ont été surélevées jusqu'à 14 mètres pour protéger Hanoï des plus hautes crues. Le niveau du fleuve domine en effet la ville, située à 5,5 mètres seulement, six à sept mois par an.
Thang Long, qui a précédé Hanoï, a été fondée en 1010 par la dynastie des Ly, mais c'est l'empereur Gia Long qui, depuis sa capitale installée à Hué, a reconstruit la citadelle en 1805 selon des plans inspirés par Vauban. La concession française, établie en 1875, devint en 1884 la capitale du Tonkin et, en 1902, la capitale de l'Indochine française. À ce titre, elle fut l'objet d'un véritable projet urbain colonial fondé sur le concept de la ville-jardin, valorisant les nombreux lacs qui marquent l'identité paysagère de Hanoï.
La ville ancienne, précoloniale, s'est définie par rapport au fleuve, le quartier marchand (les trente-six rues spécialisées par corporations) relie en effet la citadelle à l'ouest à l'embarcadère à l'est par lequel transitaient les échanges. Ce tropisme a été suivi au début par la ville coloniale qui s'est déployée plus au sud, entre la concession le long du fleuve et le quartier colonial qui la jouxte à l'ouest. Le quartier administratif encadre la citadelle, les rues commerçantes et les villas du quartier en damier le prolongent vers le sud. Un renversement de la circulation s'est opéré, au cours de la période coloniale, la voie d'eau s'éclipsant devant les routes et voies ferrées convergeant vers une ville qui se détourne alors du fleuve dont elle est séparée par la digue.
La densification du bâti s'est poursuivie tout au long des années de guerre, entre 1954 et 1975, et après l'indépendance une couronne d'habitat collectif de facture soviétique a rempli l'espace disponible entre la ville ancienne et le Song To Lich, faisant disparaître bon nombre de lacs. L'activité commerciale, restée cantonnée autour du marché central et des trente-six rues jusqu'à la libéralisation de l'économie, s'est étendue, depuis les années 1990, au reste de la ville, reproduisant la spécialisation des boutiques par rues de la ville marchande. Aujourd'hui, la construction de centres commerciaux et d'hôtels de luxe menace l'unité de la ville coloniale jusqu'alors préservée. Les complexes de loisirs s'étendent au détriment des villages périurbains autour du Grand Lac, les tours s'élèvent en bordure de la ville coloniale et les « mini-hôtels », tout en hauteur, rompent l'harmonie des compartiments de la ville marchande, l'urbanisation spontanée gagne l'avant-digue du fleuve, en dépit des inondations récurrentes.
La ville s'est donc étalée en étoile, à l'image du réseau routier et au rythme de la construction des ponts sur le fleuve Rouge (doublement du pont Doumer pour accéder à la route d'Haiphong et nouveau pont en amont conduisant à l'aéroport). La ville franchit désormais le fleuve au nord, et étend progressivement au sud ses tentacules en suivant les axes routiers, bordés par des zones industrielles et des parcs technologiques. Elle atteint désormais les limites d'un second casier bordé à l'ouest par le Song Nhué. Trois périphériques traversants, en construction, jalonnent cette dynamique d'étalement urbain et de développement industriel.[...]
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Écrit par
- Christian TAILLARD : directeur de recherche au C.N.R.S.
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