Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

HARMONIE

La résonance « naturelle » et l'intégration des « dissonances »

Pour demeurer dans le domaine de la théorie harmonique pure, on doit maintenant pousser plus avant l'étude du phénomène de la résonance, qui demeure, jusque dans les premières années du xxe siècle, la base de toute l'évolution du langage musical.

Harmoniques de do - crédits : Encyclopædia Universalis France

Harmoniques de do

Tous les éléments d'un accord sont, ainsi que l'a démontré Jean-Philippe Rameau (1683-1764), organiquement liés les uns aux autres, parce qu'« engendrés du même son ». Cette génération revenant, en fait, au renforcement d'intensité de ses harmoniques naturels, tous les sons figurant au tableau de ces harmoniques pourraient, semble-t-il, avoir les mêmes droits à être considérés, relativement au son de base, comme des consonances. Si l'on se reporte au tableau des seize premiers harmoniques d'un do grave, on constate que, jusqu'au son 6, on est en pays de connaissance ; l'histoire du langage harmonique peut se schématiser dans l'intégration progressive aux accords des harmoniques de la figure. Si, à partir du son 6, on élimine les sons déjà acceptés dans l'accord parfait majeur, il faut annexer le si bémol, le , le fa dièse, le sol dièse, le si naturel.

Ces harmoniques sont largement dispersés par la nature dans l'espace sonore. En déplaçant chacun d'eux pour le mettre à la plus petite distance possible de la note de base, leur ensemble s'organise selon une superposition de tierces, les unes majeures, les autres mineures. De là vient que l'on ramène généralement chaque étape nouvelle de l'évolution du langage harmonique à l'ajout d'une tierce à la combinaison déjà acceptée par l'oreille.

Ainsi prennent place l'un après l'autre dans l'histoire l'accord parfait, puis les accords de septième, de neuvième, de onzième, de treizième.

Accord dissonant en do - crédits : Encyclopædia Universalis France

Accord dissonant en do

Au cours de l'évolution, chaque son non encore intégré passe par une phase où il est toléré comme dissonance et soumis en tant que tel à un régime spécial. Et puis l'habitude de l'oreille finit par l'admettre. Rien là que de normal. La tierce elle-même a subi la même quarantaine, et il lui a fallu des siècles pour se faire accepter.

Accords de 4 sons - crédits : Encyclopædia Universalis France

Accords de 4 sons

C'est de la même manière que le son 7, si bémol, à distance de septième majeure, a commencé sa carrière. Si, sur chaque degré du mode d'ut, on superpose une septième à l'accord parfait (sans faire appel à des altérations qui détruiraient le caractère diatonique du mode), comme pour la tierce, la distance au son de base varie d'un demi-ton. Il y a des septièmes majeures et des septièmes mineures. La septième mineure (si bémol sur le do grave) est seule conforme à la résonance, à vrai dire avec une assez forte approximation. C'est pourquoi son annexion a été beaucoup plus rapide. Mais dans les débuts, en tant que dissonance reconnue, elle dut se plier au traitement appliqué aux dissonances par la technique du temps, ce traitement consistant dans sa préparation et sa résolution.

Résolution d'une dissonance - crédits : Encyclopædia Universalis France

Résolution d'une dissonance

Préparer une dissonance, c'est faire entendre la note dangereuse dans un premier accord où elle est consonante, puis, tout en la maintenant en place, changer cet accord pour un autre où elle fait subversion. Résoudre la dissonance, c'est la faire glisser de cette position réputée instable sur un son qui rétablit l'équilibre consonant. Que s'est-il passé durant le temps où la dissonance a joué son rôle ? Il s'est créé une tension au sein d'un complexe statique. Toute la musique basée sur l'harmonie repose sur ce principe dynamique. L'accord consonant vertical avait introduit dans la polyphonie médiévale un danger d'immobilité, l'accord consonant formant un ensemble stable qui n'appelle rien après lui, donc statique.

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : compositeur de musique, ancien directeur de la musique et du programme national de la Radiodiffusion française

Classification

Médias

Accords de 3 sons - crédits : Encyclopædia Universalis France

Accords de 3 sons

Harmoniques de do - crédits : Encyclopædia Universalis France

Harmoniques de do

Accords de 4 sons - crédits : Encyclopædia Universalis France

Accords de 4 sons

Autres références

  • ACCOMPAGNEMENT MUSICAL

    • Écrit par
    • 1 920 mots
    ...point question. En effet, chacune des mélodies qui s'imbriquent en contrepoint conserve sa vie propre, authentique, et aucune n'est au service des autres. L'accompagnement naîtra seulement le jour où l'harmonie apparaîtra. Évidemment, la simultanéité de plusieurs lignes mélodiques, dans le contrepoint,...
  • ARCHYTAS DE TARENTE (env. 440-env. 360 av. J.-C.)

    • Écrit par
    • 425 mots

    Né vers 440 avant J.-C. et mort vers 360 avant J.-C. à Tarente, colonie grecque d'Italie du Sud, Archytas de Tarente est un scientifique, philosophe et mathématicien de l'école de Pythagore. Son ami proche, Platon, se fonde sur ses travaux mathématiques. Quelques sources prouvent qu'Euclide...

  • ARRANGEMENT, musique

    • Écrit par
    • 4 319 mots
    • 1 média
    ...négligeait de la préciser. De telles coutumes cessent d'ailleurs dès le début du xviie siècle. Mais une autre leur survit, qui consiste à ne noter l' harmonie que sous la forme d'une basse chiffrée. Le compositeur se contentait alors d'écrire la partie mélodique supérieure, et la basse avec les chiffres...
  • BAROQUE

    • Écrit par , et
    • 20 831 mots
    • 23 médias
    ...supérieure, mais chanteront occasionnellement à l'alto, au ténor, voire à la basse), et la voix grave, comme basse continue, devient le support de l' harmonie. Par opposition à des mélodies diatoniques de faible ambitus, le baroque va cultiver des mélodies chromatiques aussi bien que diatoniques de grand...
  • Afficher les 28 références