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COXETER HAROLD SCOTT MACDONALD (1907-2003)

Dans le paysage mathématique du xxe siècle, marqué par l'abstraction, l'œuvre de Harold Scott MacDonald Coxeter tranche par ses aspects esthétique et intuitif. Selon l'architecte Richard Buckminster Fuller (1895-1983), Coxeter, né à Londres le 9 février 1907, serait « le géomètre de notre vingtième siècle agité ». Enfant prodige, il excelle tant en musique qu'en mathématiques, mais se consacrera à ces dernières pendant ses études à Cambridge. En 1936, il est nommé professeur à l'université de Toronto, où il restera jusqu'à sa mort, le 31 mars 2003.

Sourd aux effets de mode, Coxeter s'oriente vers la géométrie à une époque où cette science millénaire paraît en déclin. Il résiste aux sirènes de l'axiomatique quand, à la suite de David Hilbert, les mathématiciens pensent réduire la géométrie à l'étude des conséquences logiques d'un système d'axiomes. Dans les années 1950, on le voit comme le maître incontesté d'un art désormais désuet. Quelques décennies plus tard, on l'acclamera pour avoir conduit la résurrection de ce domaine enterré trop rapidement.

Se demandant pourquoi il n'existe que cinq solides réguliers, dits platoniciens, il commence d'explorer les « polytopes », leurs généralisations en plus de trois dimensions. Il s'intéresse aux différentes manières dont on peut construire des frises, paver le plan ou arranger des sphères dans les espaces euclidiens et non euclidiens. Ces diverses formes géométriques ne pouvant, souvent, être construites physiquement, Coxeter en étudie les propriétés de symétrie. Ses équations algébriques qui expriment le nombre d'images pouvant être vues dans un kaléidoscope dans l'espace à n dimensions sont désormais connues comme les « groupes de Coxeter ». Dans le traité de Bourbaki, pinacle de l'abstraction mathématique, Coxeter est présenté comme celui qui fait se rejoindre deux courants de l'histoire de la théorie des groupes, les permutations et les symétries en géométrie.

Collectionneur de modèles mathématiques, Coxeter était fasciné par l'esthétique des figures géométriques régulières. Son père, fabricant d'instruments médicaux, rêvait de se consacrer à la sculpture, et sa mère était artiste peintre. Ses ouvrages, richement illustrés, inspirent les artistes. En 1954, il se lie d'amitié avec le graveur néerlandais Maurits Cornelis Escher (1898-1972) qui réalise la série des « cercles limites » basés sur le modèle du plan projectif conçu par Henri Poincaré. En 1996, Coxeter confirmera que son instinct de peintre l'avait conduit à produire des figures mathématiquement exactes.

Végétarien notoire, écologiste convaincu, Coxeter avait refusé, au nom de son pacifisme, de participer aux travaux de cryptographie pendant la Seconde Guerre mondiale. Son œuvre sera néanmoins reprise dans de nombreux domaines. Les groupes de Coxeter et la représentation graphique qu'il en donne serviront en physique des particules élémentaires. Ses études sur les solides archimédiens, comme le ballon de football dont les faces sont hexagonales et pentagonales, auront un impact dans deux domaines : l'architecture, avec la conception du dôme géodésique par Fuller, et la chimie, avec la découverte, en 1985, du buckminsterfullerène – une molécule composée de 60 atomes de carbone – par Harold Kroto (1939-2016), Robert Curl (1933-2022) et Richard Smalley (1943-2005), qui reçurent le prix Nobel de chimie en 1996.

Coxeter est l'auteur d'une douzaine de livres dont certains très populaires. Il a dirigé de multiples rééditions deMathematicalRecreations and Essays, publié par Rouse Ball en 1887, si bien qu'on peut le considérer comme l'unique auteur de la treizième édition de 1987. Son Introduction to Geometry est une tentative délibérée[...]

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