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HASSIDISME MODERNE

Né en Ukraine vers 1750, le hassidisme moderne a eu pour initiateur le légendaire Baal Shem Tov (1700-1760) ; il compte aujourd'hui encore plusieurs dizaines de milliers de fidèles, les ḥasidim, groupés en des communautés qui se réclament chacune de rebs, leurs chefs spirituels, et qui s'assemblent dans des maisons d'étude et de prière (chtibel). Les hommes ont un aspect caractéristique ; ils portent des barbes broussailleuses et des « papillotes » (mèches temporales) et sont coiffés de larges chapeaux noirs ou de toques de fourrure (chtraïmel).

Les événements précurseurs du hassidisme moderne se situent autour de 1648 : alors que le système féodal polonais se désagrège et que les paysans ukrainiens se révoltent contre les seigneurs, les juifs, dont les plus riches sont souvent les intendants, fermiers, usuriers, cabaretiers des féodaux, sont les victimes désignées des insurgés. La misère s'installe dans les communautés juives ; elle touche surtout les couches défavorisées, artisans, colporteurs, boutiquiers... Parmi celles-ci se développent alors des mouvements religieux qui, sous la conduite de « messies » (Šabbetay Ṣevi, 1626-1676 ; Jacob Frank, 1726-1791), rejettent notamment la morale traditionnelle du judaïsme et débouchent sur la conversion de leurs chefs, et de nombre d'adeptes, à l'islam et au catholicisme.

Dans cette conjoncture, l'enseignement du Baal Shem Tov et de ses premiers disciples (souvent des prêcheurs itinérants) est mal accueilli par les rabbins et les notables communautaires. Il est vrai que le hassidisme défie les traditions intellectualistes de l'étude talmudique, socialement très sélectives, en réhabilitant la piété spontanée et joyeuse de l'ignare, nivelant ainsi tous les croyants. Le hassidisme sanctifie aussi tout acte de vie, même les plus charnels ; il introduit la danse, des chants extraliturgiques et l'exaltation, sinon l'extase, dans les célébrations rituelles. Les rebs, qui s'établissent à l'écart des communautés officielles, voient accourir à leur résidence des milliers de visiteurs en quête d'une atmosphère mystique et fraternelle, d'un contact personnel avec ces chefs spirituels dont ils attendent les enseignements (toïres), les bénédictions et, parfois contre le gré de ceux-là, des interventions thaumaturgiques. La condamnation des rabbins est radicale, allant jusqu'à l'excommunication (hérém). Pourtant, le hassidisme demeure attaché à la morale traditionnelle, renvoie le messianisme au futur et réhabilite vite l'étude talmudique ; enfin, chefs et fidèles se montrent soumis aux observances et scrupuleusement fidèles aux lois judaïques.

Entre 1780 et 1815, le hassidisme s'étend en Ukraine et en Galicie, porté par divers disciples du Baal Shem Tov, tels Jacob Joseph de Polnoïe (décédé en 1782) et Nahman de Bratslav (1772-1811). Les pouvoirs spirituels et charismatiques des rebs sont transmis héréditairement ou à un proche disciple ; et de véritables dynasties, chacune avec son accentuation propre, se constituent ; certaines subsistent encore aujourd'hui : ainsi celle de Lubavitch fondée au début du xixe siècle ; le reb réside à Brooklyn (New York). Le plus souvent, c'est le nom de la première résidence du fondateur (transposé en yiddish) qui qualifie la dynastie, tels Loubavitch, Karlin, Berditchev, Sanz, Guèr. Dès le début du xixe siècle, le hassidisme noyaute les communautés juives de Pologne, axe démographique du judaïsme. Rebs et rabbins se réconcilient pour lutter ensemble contre diverses idéologies laïcisantes qui, dans le sillage du libéralisme et du capitalisme moderne, tendent à désagréger les communautés juives. Le hassidisme devient ainsi un pôle majeur de l'orthodoxie juive. À partir de 1870, des millions de Juifs persécutés et appauvris quittent l'Europe orientale,[...]

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