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HATA CHITEI (XIe s.)

« Vie du prince Shōtoku » au pavillon des Peintures du Hōryū-ji

Exécutés entre février et mai, mis en place en juin de l'an 1069, les cinq grands panneaux peints sur soie damassée couvraient à l'origine la paroi de droite (côté est), les trois parois du fond (côté nord) et enfin la paroi de gauche (côté ouest) constituant la partie postérieure ou sanctuaire (naijin) du pavillon des Peintures.

Les cinquante-six scènes tirées de la vie du prince s'insèrent dans un grand paysage de montagnes et de collines boisées, ponctué de palais et de temples, sillonné de cours d'eau ; de petits cartouches distribuent un bref commentaire calligraphié, qui s'inspire pour une bonne part d'un ouvrage hagiographique, Shōtoku Taishi denryaku, rédigé au début du xe siècle. Cette vaste composition se déroule sur les cinq panneaux. Tout comme dans les e-maki, longs rouleaux enluminés qui s'ouvrent horizontalement, la vision est cavalière, les scènes sont regardées obliquement de haut en bas et se succèdent de droite à gauche. Les palais, temples et rivières donnent l'axe de la composition et indiquent la perspective. Bien que fort compliqué au premier coup d'œil, l'ensemble répond à un schéma très construit, qui lie habilement les concepts de temps et d'espace et harmonise à la perfection catéchèse et décoration.

Ampleur de la composition, rythme dû à la disposition oblique des édifices entre les accidents de terrain, distribution ingénieuse des épisodes vécus tant à ciel ouvert qu'à l'intérieur (soit, selon les conventions japonaises, à toit retiré), aisance du pinceau et souplesse du dessin, tout atteste la grande habileté et le talent de cet artiste local.

Cependant, les cinq panneaux ne sont pas restés dans leur état originel. Ils firent l'objet de plusieurs restaurations : en 1338-1339 (et le coloris actuel date, pour l'ensemble, de cette époque), en 1380, en 1675 ; ils furent ensuite montés en cinq paravents à deux feuillets en 1788. Ceux-ci furent offerts à la famille impériale en 1878 et passèrent enfin dans les collections du musée national de Tōkyō.

Il ressort des recherches aux rayons X et à l'infrarouge que la composition de l'œuvre a été très peu altérée par les restaurations successives, que la soie originale est conservée dans l'ensemble et que là où le coloris sur la soie d'origine a disparu, le dessin de Hata Chitei subsiste toujours.

Aussi, en dépit des restaurations, cette œuvre reste-t-elle majeure pour la peinture du xie siècle : c'est, dans l'évolution stylistique, un jalon qui permet de suivre le départ, déjà amorcé, entre la tradition chinoise et les progrès d'une expression proprement japonaise.

— Chantal KOZYREFF

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Écrit par

  • : conservatrice des collections Japon, Chine et Corée aux Musées royaux d'art et d'histoire, Bruxelles, gestionnaire des musées d'Extrême-Orient

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