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GUIMARD HECTOR (1867-1942)

L'architecture de l'Art nouveau français a eu en Guimard un créateur tel que l'espéraient, depuis le milieu du xixe siècle, le comte de Laborde et Viollet-le-Duc. Peut-être le premier en France, Guimard a totalement rejeté le modèle antique, enseigné dans les écoles des Beaux-Arts, pour lui préférer l'imitation de la nature à la façon des artistes gothiques ou japonais.

Alors que tous ses prédécesseurs abandonnaient le décor intérieur aux tapissiers, il a suivi le précepte de Ruskin touchant la réconciliation du Beau et de l'Utile et il a pris en charge l'équipement complet des maisons qu'il construisait. Ressentait-il, lui aussi, une certaine angoisse devant le monde industriel, ce qui l'obligea longtemps à se cacher dans un décor « naturel », c'est probable : Salvador Dalí l'avait bien remarqué en relevant dans le Modern Style « le besoin de refuge dans un monde idéal, à la manière de ce qui se passe dans une névrose d'enfance » (La Femme visible, 1930).

Reste que, comme tous les tenants de l'Art nouveau européen, Guimard a rendu insupportables les constructions archéologiques qui encombraient le terrain depuis un siècle. Grâce à lui le Mouvement moderne pouvait naître.

La conquête de Paris

Né à Lyon dans une famille sur laquelle on est encore très mal renseigné – en 1891, son père tient un gymnase, boulevard Malesherbes, à Paris –, Hector Guimard entre à quinze ans, en 1882, à l'École nationale des arts décoratifs dirigée par le peintre Louvrier de Lajolais : il entretint avec ce dernier des rapports quasi filiaux, la correspondance des deux hommes en témoigne. Trois ans plus tard, il s'inscrit à l'École des beaux-arts mais il en sortira sans diplôme, ce qui fut également le cas de son ami Henri Sauvage et d'Auguste Perret. Dès cette époque, le jeune étudiant devait avoir des mécènes ou manifester un bel esprit d'entreprise puisqu'il exécute une commande, un café-restaurant, Au Grand Neptune – actuellement quai Louis-Blériot –, alors qu'il vient juste d'atteindre sa majorité.

L'année suivante, Guimard participe à l'Exposition universelle de 1889 avec la commande du pavillon de l'Électricité et, peu après, il commence la maison Roszé, 34, rue Boileau, dans le XVIe arrondissement, bientôt son terrain d'élection. Lui succèdent la villa Jassédé, 41, rue Chardon-Lagache, et surtout l'école du Sacré-Cœur, 9, avenue de La Frillière, où il rend un hommage à Viollet-le-Duc en lui empruntant, pour soutenir la façade, des béquilles de fonte présentées par le maître dans ses Entretiens sur l'architecture.

En 1894, grâce à l'appui d'Anatole de Baudot, le futur constructeur de Saint-Jean de Montmartre, la première église de Paris en béton armé, il obtient une bourse de voyage au Salon du Champs-de-Mars : Guimard l'utilisera pour un voyage en Grande-Bretagne et en Belgique. Sa rencontre avec Horta – qui vient d'achever l'hôtel Tassel – sera décisive. Chargé à ce moment d'édifier le Castel Béranger, 14, rue La Fontaine, un immeuble de trente-six appartements, il change son premier projet, romano-gothique, pour le transformer en manifeste de l'Art nouveau que le public et les critiques seront appelés à visiter librement.

Dans le lancement de cette maison de rapport, Guimard a en effet, le premier en France, utilisé des procédés qui seront repris par les promoteurs du xxe siècle. Le 4 avril 1899, il prononce une conférence dans les salons du Figaro où sont exposés des objets en grès, fonte, cuivre, des cheminées, des lambris, des tentures, des meubles qui voisinent avec des aquarelles représentant le Castel.

Le jeune maître se place sous le patronage de Viollet-le-Duc, la figure emblématique de tous les architectes de l'Art nouveau européen. Puis il rend[...]

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