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HEINECCIUS JOHANN GOTTLIEB HEINECKEM dit (1681-1741)

Élève de Thomasius (1655-1728), professeur de philosophie (1716) puis de droit à Halle (1721), Johann Gottlieb Heineccius fut appelé en 1723 à Franecker (Frise), ville où existait une vieille université que Napoléon supprimera en 1810. Après être passé par Francfort-sur-l'Oder, Heineccius revint à Halle où s'écoula la plus grande partie de sa vie universitaire et scientifique, particulièrement active. Son œuvre fait de lui l'un des grands juristes européens du xviiie siècle. L'œuvre écrite laissée par Heineccius concerne trois domaines juridiques différents : le droit romain, le droit naturel et — c'est là son apport le plus important — le droit germanique. Son Antiquitatum romanorum syntagma, publié en 1719 et dont une vingtième édition sera encore donnée à Francfort-sur-le-Main en 1841, le discours prononcé à Franecker en 1725, De jurisprudentiae romanae formulis ritibusque antiquis, qui envisage le problème du formalisme en droit romain, les Commentarii ad legem Juliam et Papiam Poppaeam (1726), des écrits sur Juventius Celsus et sur d'autres jurisconsultes romains s'inscrivent dans la ligne des œuvres des juristes humanistes soucieux de replacer le droit romain dans le cadre historique de son époque (l'école dite de l'Elegante Jurisprudenz). Tandis que son intérêt pour le droit privé allemand et l'histoire du droit germanique se traduit dans une sorte de manifeste que constitue son De jure antiquo germanici diligentius excolendo et plus encore dans ses Elementa juris germanici (2 vol., Halle, 1735-1737) qui fournissent le premier exposé d'ensemble du droit privé allemand, au contraire, Heineccius se montre disciple fidèle de Thomasius dans un livre de droit naturel Elementa juris naturae et gentium (Halle, 1737).

Heineccius lui-même considérait les Elementa juris germanici comme son œuvre maîtresse, celle à laquelle il avait apporté le plus de soin et de recherches. Sans doute n'est-il pas le premier à tenter un exposé du droit germanique, qui utilise d'ailleurs les cadres conceptuels et les notions juridiques romaines. On peut citer avant lui la Jurisprudentia romano-germanica de G. A. Struve (Iéna, 1670) qui fut en son temps fort répandue. Heineccius se propose de donner un tableau d'ensemble de la partie de l'usus modernus qui constituait le droit germanique, c'est-à-dire, selon lui, les principes communs de l'ancien droit germanique, ceux des Land et Stadtrechte médiévaux et ceux des sources modernes du droit allemand ; il prétend ordonner cet ensemble disparate en une masse homogène et le place en face du droit romain ; il ne dénie pas à ce dernier le rôle de source subsidiaire. Le droit germanique, tel que l'entend Heineccius, ne se limite donc pas aux matières qu'avait ignorées le droit romain : il forme un vaste ensemble, s'étend à des domaines qui étaient également envisagés par la compilation justinienne et ne laisse à celle-ci qu'un rôle d'appoint. Le plan général de l'œuvre suit celui des Institutes de Justinien. Un premier livre traite des personnes ; le second du jus rerum (droits réels, successions, obligations, délits) ; le troisième, de la procédure. Dans le détail, cependant, Heineccius ne s'interdit pas quelques libertés avec le plan des Institutes.

Il reprend la distinction faite par les romanistes médiévaux (en particulier Balde) mais qu'ignorait le droit romain justinien entre jus in re (propriété, servitudes, droit successoral, gage) et jus ad rem vel in personam. Cette classification avait d'ailleurs été largement vulgarisée par les juristes de l'école hollandaise ; Grotius et Leibniz l'avaient utilisée, ce dernier en particulier dans sa Nova Methodus discendae docendaeque jurisprudentiae. Heineccius distingue également les modes d'acquisition de la propriété[...]

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Écrit par

  • : professeur à la faculté de droit et des sciences économiques de Paris, directeur d'études à l'École pratique des hautes études

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