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CURIEL HENRI (1914-1978)

Né au Caire, fils d'un riche banquier juif, Henri Curiel fit ses études secondaires (françaises) chez les jésuites, mais, ému par la misère du peuple égyptien, dont le vif contraste avec la richesse familiale lui donne un sentiment de culpabilité et de responsabilité, impressionné par ce qu'il sait de l'expérience soviétique, il incline vite vers les idées communistes et, à sa majorité, opte pour la nationalité égyptienne, malgré les avantages que lui conférait la nationalité italienne, qu'il pouvait garder.

Comme il n'y a pas de parti communiste égyptien, il se rattache d'abord à l'Union démocratique, groupe antifasciste formé surtout d'« étrangers ». Il fonde en octobre 1943 un Mouvement égyptien pour la libération nationale (M.E.L.N.), qui sera le plus important des groupes communistes de l'époque. En mai 1947, il fusionne avec le second en importance de ces groupes, l'Iskra, pour former le Mouvement démocratique pour la libération nationale (M.D.L.N. ou d'après son nom arabe Hadeto). Les querelles personnelles et les divergences tactiques aboutiront très vite à diverses fragmentations.

Henri Curiel est accusé par les communistes qui ne le suivent pas de diverses « déviations », ainsi que de sionisme, pour avoir approuvé en 1947-1948, à la suite de l'U.R.S.S., le partage de la Palestine entre un État arabe et un État juif. Depuis 1942, il a été souvent traduit en justice et emprisonné à plusieurs reprises. La loi martiale proclamée au moment de la guerre de Palestine (mai 1948) permet de l'interner pendant près de deux ans. Peu après sa libération, il est expulsé d'Égypte (septembre 1950).

Il s'établit en France, d'abord de façon semi-clandestine. Son militantisme se tourne vers l'aide aux mouvements de libération dans le Tiers Monde. Il réussit à mobiliser dans ce dessein un certain nombre d'anticolonialistes, utilisant un noyau d'exilés d'Égypte qui suivent son inspiration. Son action en faveur du F.L.N. algérien provoque son internement à Fresnes, d'octobre 1960 à la fin de la guerre d'Algérie (1962).

Libéré et doté du statut légal de réfugié, il poursuit son action d'aide aux mouvements de libération et aux exilés du Tiers Monde, notamment au sein d'un groupe Solidarité (puis Aide et amitié), auxquels collaborent des personnalités religieuses de gauche. Malgré sa vive foi communiste, l'indépendance de son action (en partie forcée) lui vaut la méfiance des divers partis communistes, surtout celle du P.C.F., a qui il a essayé en vain, en 1952, d'inspirer une attitude plus positive envers le Mouvement des officiers libres en Égypte et qui a déclaré suspectes, vers la même date, ses relations épisodiques avec André Marty.

Dénoncé par des hebdomadaires (Le Point, Der Spiegel, etc.), surtout depuis 1976, comme un agent soviétique et/ou un grand maître du terrorisme international, il est assigné à résidence à Digne par le ministère de l'Intérieur (octobre 1977-janvier1978). Il est assassiné à son domicile à Paris, le 4 mai 1978, par les « commandos Delta », société secrète qui a repris le sigle d'un groupe de l'O.A.S. et commis en France des attentats contre des Algériens.

Henri Curiel était une personnalité charismatique qui attirait les dévouements. Militant-né, pour qui l'action politique était un élément vital indispensable, il était prompt à prendre des options tactiques et à convaincre ses fidèles de leur validité. Peu intéressé par la théorisation, il orientait cette action selon les idées forces simples du communisme de l'époque stalinienne. L'accent était cependant mis en priorité sur la « libération » des masses souffrantes du Tiers Monde, que seule l'Union soviétique était censée aider de façon désintéressée. Historiquement, il a joué un rôle important en Égypte en contribuant,[...]

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Écrit par

  • : directeur d'études à l'École pratique des hautes études (IVe section)

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