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GOETZ HENRI (1909-1989)

Inventeur infatigable, Henri Goetz n'a cessé de mettre au point toutes sortes de techniques dont l'art de la gravure a bénéficié. La plus célèbre, dite au Carborundum – une sorte de peinture réalisée à l'aide de poudres qui donnaient une plaque en relief –, a révolutionné les pratiques conventionnelles en supprimant le travail en creux. Ce sont encore d'autres procédés de collage, d'impression ou de fixation des pastels, par exemple, qu'il a élaborés dans le secret de son atelier, passionné par les multiples manipulations qu'il faisait subir aux matériaux les plus divers.

Né à New York en 1909, Henri Goetz reçoit une formation d'ingénieur électricien à Harvard et à Boston avant de s'aventurer dans la voie artistique. Ses études achevées, il se rend à Paris où il s'installe en 1930 (il sera naturalisé français en 1949) et l'idée de faire une carrière de peintre l'attire alors irrésistiblement. Goetz fait preuve d'indéniables qualités de portraitiste qui lui permettent de s'intégrer très rapidement au milieu des artistes de Montparnasse. Là, il rencontre Hartung, Picabia, Eluard et Breton et il abandonne l'art figuratif pour adhérer étroitement au surréalisme. Ce mouvement qui prône la liberté subjective convient pleinement à la personnalité de Goetz qui ignore encore que ses possibilités artistiques se situent davantage sur le terrain de l'abstraction. Il le découvrira grâce à l'artiste Christine Boumeester (1904-1971), qu'il épouse en 1935 ; c'est elle qui l'initiera à tous les secrets de l'estampe. Pointe sèche, burin, eau-forte, aquatinte seront désormais ses techniques de prédilection, et c'est en alchimiste de la couleur qu'il imposera bientôt sa marque, comme en témoigne sa première exposition personnelle à Paris, en 1937, à la galerie Van Leer. Avide d'échanges et de découvertes, Goetz crée une académie et y enseigne l'art de la gravure parce que rien n'est plus enrichissant à ses yeux que le dialogue avec les jeunes.

Pendant la guerre, ayant trouvé refuge sur la Côte d'Azur, il établit sa résidence d'été à Villefranche-sur-Mer. Enseignant aux écoles d'art américaines de Fontainebleau, Henri Goetz développe une œuvre singulière dans la familiarité de l'abstraction lyrique. Reposant sur des formes simples. réparties avec une étonnante liberté dans des compositions grouillantes de vie, son œuvre s'applique, comme il aimait le dire, à « modifier notre état d'esprit, notre manière d'agir, notre attitude en face de la réalité ». À l'égal de sa production gravée, ses huiles, pastels et dessins au crayon de couleurs présentent ce même caractère d'accumulation de matières et de signes. Après la mort de sa femme en 1971, Goetz répond à la solitude par un travail de plus en plus acharné. Homme fier et d'une grande pudeur, il poursuit sa route jusqu'aux jours cruels de la maladie à laquelle il décide lui-même de mettre un terme.

Retiré à Villefranche-sur-Mer depuis plusieurs années, il avait fait une importante donation de ses œuvres et de celles de sa femme à la vieille citadelle qui abrite le musée qui porte désormais son nom.

— Philippe PIGUET

Bibliographie

J.-P. Geay, Goetz, Éd. du Cercle d'art, Paris, 1989.

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  • GRAVURE

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    ...intellectuel de son travail, d'où une attirance compréhensible vers la gravure où les medium nouveaux permettent de nouveaux styles. Le peintre Goetz a inventé à lui seul trente-six procédés de gravure, dont celle au « carborundum ». Il n'est guère d'école moderne qui n'ait « réinventé » la gravure....