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NOGUÈRES HENRI (1916-1990)

Né le 13 novembre 1916, à Bages, dans les Pyrénées-Orientales, que son père, Louis Noguères, également avocat, représenta à la Chambre des députés, Henri Noguères fut fidèle à l'engagement socialiste de sa famille. À vingt ans, il collabora, avec Léon Blum, au journal Le Populaire, dont il fut rédacteur en chef de 1946 à 1949. À la même époque, il fut aussi marqué par les responsabilités qu'exerçait son père, président de la Haute Cour de justice instituée pour juger les responsables de la politique de l'État français.

Pour cet ancien prisonnier, rapatrié sanitaire, qui s'inscrivit au barreau de Paris en 1942 et dont la femme fut aussi lieutenant F.F.I., la Résistance avait été un engagement total dans le Parti socialiste clandestin qu'animait Daniel Mayer et dans le mouvement Franc-Tireur. Membre du comité régional des mouvements unis de résistance pour le Languedoc-Roussillon, « Mathias » avait sillonné sa région à bicyclette pour y développer les maquis, après s'être occupé d'une filière d'évasion, des groupes francs, des services sociaux. Délégué régional à l'information en 1944, il revint au Populaire de Paris en 1946, avant de créer l'Agence centrale parisienne de presse en 1949 et de participer à la fondation d'Europe no 1 en 1954. Rédacteur en chef de la revue Aux carrefours de l'histoire, de 1960 à 1964, Henri Noguères fut directeur administratif aux éditions Robert Laffont et, de 1966 à 1976, secrétaire général des éditions Flammarion. Il s'engagea simultanément et totalement dans son œuvre d'historien, car il était convaincu de la profonde vérité qu'évoquait le titre d'une série télévisée qu'il produisit : « L'histoire dépasse la fiction ».

De 1967 à 1981, en collaboration avec Jean-Louis Vigier et surtout Marcel Degliame-Fouché, Henri Noguères a mené à bien une importante Histoire de la Résistance en France, en cinq tomes recouvrant la période de juin 1940 à mai 1945.

Son parti pris très rigoureusement chronologique – cinq parties pour cinq années, un chapitre par mois – a permis à ses lecteurs de saisir le foisonnement des actions individuelles des résistants, puis la complexité de leurs rapports et, enfin, les problèmes politiques soulevés par la structuration de la Résistance.

Le débat sur le rôle des communistes a trouvé une large place dans la série. Jean-Louis Vigier y exprima sa certitude qu'en juin 1940 la direction du Parti communiste prônait la fraternisation franco-allemande. Quant au noyautage communiste des organismes directeurs clandestins, Marcel Degliame – communiste de 1928 à 1952 – nia toute idée de complot organisé pendant qu'Henri Noguères continuait à dénoncer la colonisation des mouvements résistants par le P.C. De fait, son histoire monumentale repose largement sur les témoins, et il s'y est parfois exprimé en acteur ; il écrivait que, pour porter témoignage, « l'honnêteté intellectuelle la plus élémentaire commande, justement, de faire abstraction des éléments d'information qui, à l'époque, faisaient défaut ». Ce choix conduira les historiens à nuancer les propos des témoins en les recoupant plus systématiquement. Mais les volumes d'Henri Noguères resteront, avec leurs index de noms et d'organismes, une source très utile.

« Fidèle sa vie durant aux engagements de sa jeunesse », selon les mots du président Mitterrand, Henri Noguères fut un militant ayant le souci de l'éthique. C'est en avocat passionné qu'il fut, de 1975 à 1984, le neuvième président de la Ligue française pour la défense des droits de l'homme et du citoyen, ligue née au temps de l'affaire Dreyfus. Il se prononça contre les tribunaux d'exception, contre la loi anticasseurs et la loi « sécurité et libertés », il se félicita[...]

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Écrit par

  • : docteur en études politiques et en histoire, ancien délégué-adjoint aux célébrations nationales (ministère de la Culture et de la Communication)

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