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HENRY DE HARCLAY (1270 env.-1317)

Étudiant à Oxford, puis à Paris, ordonné prêtre en 1297, Henry de Harclay enseigna la philosophie à l'université d'Oxford, dont il devint chancelier en 1312, et fut ensuite nommé évêque de Lincoln. Toute sa vie, il s'opposa aux Dominicains, mais c'est contre Jean Duns Scot qu'il édifia son œuvre philosophique, encore très mal connue. Ni réaliste, ni nominaliste, Henry s'efforce de critiquer Avicenne afin de retrouver un aristotélisme plus pur. Duns Scot, s'appuyant sur les commentaires d'Avicenne, concevait l'individu comme un mixte d'une « nature commune » individualisée par l'activité d'une forme, son « heccéité ». Pour Henry, la natura communis de Duns Scot ne peut avoir de sens : nature et heccéité sont indissociables, et l'« humanité » de Socrate n'est pas plus commune que sa « socratéité ». La matière ne peut constituer le principe d'individuation d'une substance (et sur ce point Henry tombe d'accord avec Jacques de Metz), mais l'heccéité non plus : la nature est individuelle immédiatement, et aucune distinction n'est admissible entre substance et nature. Ainsi, « toute chose posée hors de l'âme est individuelle par elle-même ».

Ainsi, là où Averroès admettait que ni les genres ni les espèces ne sont réelles, mais que leur définition vise des individus, Henry soutient que les genres et les espèces ne sont qu'un certain point de vue sur les individus. Prise en soi, hors de l'âme, toute chose réelle est individuelle, mais elle peut être perçue confusément comme genre et espèce. En refusant les réalités, les entités (opposées aux choses ou êtres) de Duns Scot, qui sont en quelque manière réelles, Henry semble en revenir aux positions d'Abélard. Pourtant, il s'approche du nominalisme d'Ockham en refusant la réalité de la natura communis telle que la conçoit Duns Scot, même si, pour lui, l'universel demeure une représentation à laquelle correspond, dans la nature des choses, quelque chose de semblable. Il illustre ainsi parfaitement le traditionalisme antithomiste des oxfordiens, qui, en réduisant les universaux à des regards de l'intelligence sur le réel, préparent l'idéalisme.

— Olivier JUILLIARD

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