HITCHCOCK HENRY-RUSSEL (1903-1987)
Pionnier du style international dont il fut le plus ardent défenseur, auteur d'une vingtaine d'ouvrages, devenus pour la plupart des ouvrages de référence, l'historien de l'architecture Henry-Russel Hitchcock est mort d'un cancer à New York le 19 février 1987. Cet insatiable érudit était une figure populaire de l'Université américaine, entre Harvard et New York. Constamment enveloppé de la fumée bleue de ses chères Gauloises, ce bon vivant jovial et généreux, à la voix de stentor, était connu de ses étudiants et collègues sous le seul nom de « Russel ». Né à Boston, Hitchcock commença à écrire pendant ses études à l'université Harvard, contribuant à Hound & Horn, un périodique estudiantin qui prônait le modernisme dans les arts (parmi les autres membres de ce cercle d'intellectuels radicaux qui collaboraient à la revue, citons T. S. Eliot et Virgil Thompson).
Après avoir passé quelque temps à la School of Design de Harvard, il décida d'entreprendre un doctorat en histoire de l'art. Dès cette époque, son principal centre d'intérêt était l'architecture moderne, qui, en cette fin des années 1920, ne pouvait constituer un sujet convenable de recherche. Par une ironie du sort, celui dont la carrière académique devait culminer avec sa nomination à l'Institute of Fine Arts de l'université de New York, après des années d'enseignement à Vassar College et Smith College, à la Wesleyan University, à Yale et Harvard, resta dépourvu du traditionnel diplôme, lacune que vinrent combler par la suite de nombreux titres honorifiques.
Sa carrière d'historien et de critique de l'architecture moderne commença véritablement avec sa collaboration à la revue Architectural Record et la parution en 1929 de son premier livre : Modern Architecture : Romanticism and Reintegration. Après avoir analysé la « désintégration » de l'architecture au xixe siècle sous les coups du romantisme historiciste, il présentait sa « réintégration » en deux étapes. Tout d'abord sous l'influence d'architectes tels que Peter Behrens, Joseph Hoffmann, Auguste Perret ou l'Américain Henry Hobson Richardson (auquel Hitchcock consacrera un livre en 1961), puis grâce aux « Nouveaux Pionniers » des années 1920 : Le Corbusier, Mies van der Rohe, Walter Gropius, qui poussèrent les élévations simplifiées de leurs prédécesseurs à leurs conséquences les plus révolutionnaires, ce que Hitchcock baptisa le « style international ».
Ami intime de l'architecte Philip Johnson, c'est avec ce dernier qu'il écrit en 1932 The International Style. L'ouvrage fait suite à une exposition organisée en 1931 par les deux hommes au Museum of Modern Art de New York, apologie des volumes élémentaires, du plan ouvert, de l'organisation en rythmes réguliers à l'exclusion de tout ornement, de toute modénature. Véritable manifeste culturel, The International Style propageait la modernité architecturale aux États-Unis. En 1942, Hitchcock faisait encore œuvre de pionnier avec In the Nature of Materials : the Buildings of Frank Lloyd Wright (1887-1941), première étude d'importance consacrée à l'architecte encore largement ignoré dans son propre pays. Ses relations avec Wright avaient du reste été orageuses. S'estimant négligé lors de l'exposition du M.O.M.A. en 1932, celui-ci s'était livré à une déclaration restée légendaire : « J'avertis Henry-Russel Hitchcock [...] que j'entends non seulement être le plus grand architecte qui ait jamais vécu, mais le plus grand architecte qui vivra jamais. Oui, j'ai l'intention d'être le plus grand architecte de tous les temps. »
Loin de se borner à être le chantre du mouvement moderne, Hitchcock – à l'instar d'une autre grande figure des temps héroïques de[...]
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Écrit par
- Jérôme COIGNARD : critique d'art
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Autres références
-
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- Écrit par Claude MASSU
- 1 139 mots
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