HÉRA
Épouse légitime de Zeus, le souverain des dieux, dont elle est aussi la sœur, Héra est la puissance du mariage. Les relations d'Héra et de Zeus ne sont pas les mêmes en dehors que dans le mariage. Frère et sœur, ils s'unissent en secret, furtivement, soit dans l'île de Samos où leurs amours sont abritées pendant trois cents ans, soit dans les profondeurs du palais occupé par le vieux couple de puissances cosmogoniques, Okeanos et Téthys. À ces unions de caractère illégitime, qui se passent dans l'ombre, répondent les noces célébrées dans la lumière du rituel : le souverain des dieux épouse Héra dite Téléia, la femme qui s'accomplit dans le mariage. L'épouse de Zeus définit alors le modèle de l'union conjugale sanctionnée par le rituel. Chaque année à Samos, à Argos, à Platée, on célébrait l'hiérogamie, le mariage sacré d'Héra et de Zeus, qui marquait le renouveau de la végétation. Chaque année, avant les épousailles, Héra retrouvait sa virginité dans les eaux vives des sources et des fleuves. C'est en regard de ces unions hiérogamiques qu'il faut situer les querelles et les séparations, qui, déjà dans l'épopée, apparaissent comme autant de dissentiments conjugaux : avant de s'unir à Zeus, Héra fait retraite et se tient à l'écart. Avant d'être solennellement unis, les deux époux sont séparés.
Dans une tradition qui va de l'épopée à la tragédie, Héra n'est pas seulement la femme de Zeus ; elle est l'épouse qui donne la souveraineté, représentée avec le sceptre, assise sur un trône. Quand Pâris (Alexandre) fait son choix entre les trois déesses (Héra, Athéna, Aphrodite) et les trois fonctions (Souveraineté, Guerre, Désir), Héra lui offre avec son lit non pas les plaisirs amoureux que promet Aphrodite, mais le pouvoir et la royauté ; ainsi Pénélope dans L'Odyssée. Les amours pédérastiques de Laïos sont punies par Héra du mariage, qu'honore sur le Cithéron le rituel des Daidala, ces grossières statues de bois, recouvertes du voile de la jeune épousée, que l'on brûle après les avoir menées en procession.
Épouse légitime, mariée rituellement, Héra n'apparaît presque jamais comme puissance maternelle. Ses rejetons les plus célèbres, elles les conçoit seule, dans le désir ou dans la haine, soit en frappant le sol de la main soit en mangeant une laitue. Typhon, comme Héphaistos, est un de ces enfants nés sans amour : le premier est une force du chaos suscitée pour détrôner Zeus, un fils plus puissant que son père ; le second est un forgeron magicien, associé aux puissances de la mer et tardivement réintégré dans l'Olympe. À l'inverse de ces deux êtres inégalement monstrueux, Arès et Hébé, le dieu de la guerre et la puissance de la jeunesse, naissent l'un et l'autre d'une laitue dont le suc laiteux rend Héra féconde, sans que Zeus la touche.
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Écrit par
- Marcel DETIENNE : directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section, sciences religieuses)
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