WEHNER HERBERT (1906-1990)

Figure marquante de la social-démocratie en république fédérale d'Allemagne, Herbert Wehner est mort à Bad Godesberg, près de Bonn, le 19 janvier 1990, à l'âge de quatre-vingt-trois ans. Cet homme politique sévère, froid, distant et redouté, qui, à cause de son passé communiste, avait suscité des réactions passionnelles, est parti respecté de tous.

Fils d'un cordonnier social-démocrate, il est né le 11 juillet 1906 à Dresde, une des places fortes traditionnelles de la social-démocratie.

Grâce à une bourse obtenue à la sortie de l'école primaire, il se prépare à un emploi administratif. Il se détourne très vite de cette voie pour s'engager dans l'action politique, avec des organisations d'extrême gauche. Militant de la cause prolétarienne, attiré par l'idéal révolutionnaire, il adhère au Parti communiste (Kommunistische Partei Deutschlands, K.P.D.) en 1927, dont il sera le secrétaire régional. Élu député de Saxe à vingt-quatre ans, en 1930, il collabore ensuite avec le président du K.P.D., Ernst Thälmann. Il entre au comité central du parti et même au bureau politique après 1933.

Après l'arrivée au pouvoir de Hitler et l'arrestation de nombreux dirigeants communistes, il est un des principaux organisateurs du parti dans la clandestinité. Il se déplace beaucoup en Europe. En 1935, il rejoint Moscou où il habite au célèbre hôtel Lux, réservé aux exilés politiques. Il s'oppose à Walter Ulbricht, qui sera l'homme fort de la R.D.A. jusqu'en 1971. Il survit par miracle aux purges staliniennes. Envoyé en mission en Suède, en 1941, il est arrêté et emprisonné jusqu'en 1944. Ayant découvert à Moscou le véritable visage du communisme, il rompt avec lui en 1942-1943. Libéré, il reste en Suède jusqu'en 1946.

Il s'installe à Hambourg et adhère au Parti social-démocrate d'Allemagne (Sozialdemokratische Partei Deutschlands, S.P.D.). Il entre comme rédacteur au quotidien S.P.D. Hamburger Echo. Par sa connaissance du monde communiste et ses talents d'organisateur, il intéresse tout de suite le nouveau président du S.P.D. en Allemagne de l'Ouest, Kurt Schumacher, qui le pousse à se présenter aux premières élections fédérales de 1949. Herbert Wehner conservera son mandat de député dans la circonscription de Hambourg-Harburg jusqu'en 1983. De 1949 à 1966, il préside la commission du Bundestag pour les questions concernant l'ensemble de l'Allemagne et Berlin. À partir de 1957, il est aussi un des responsables de la politique étrangère du S.P.D. Membre du comité directeur du parti de 1952 à 1982, il est élu vice-président fédéral du S.P.D. en 1958. Dans les années 1950, Herbert Wehner reste partisan de l'économie planifiée : il s'oppose à la politique extérieure d'Adenauer, accusée de compromettre l'unité allemande. Son passé communiste lui vaut de violentes attaques de la part des chrétiens-démocrates qui le considèrent parfois comme un espion communiste.

L'influence de Herbert Wehner sur l'évolution du S.P.D. s'affirme dans la seconde moitié des années 1950. Il comprend que son parti doit changer sur le plan idéologique s'il veut sortir de l'opposition. Il contribue pour une part importante à l'adoption du programme de Bad Godesberg (1959) qui renonce au marxisme-léninisme et marque la conversion du S.P.D. à l'économie sociale de marché. Le 19 mars 1959, Herbert Wehner lance un surprenant Deutschlandplan dans lequel il propose une coopération étroite entre les deux États allemands, sur la base de la neutralité : il comprend vite son erreur et retire son plan. Dans un discours remarqué au Bundestag, le 30 juin 1960, il annonce le ralliement du S.P.D. à la politique européenne et atlantique d'Adenauer. Le stratège Herbert Wehner se rapproche ainsi de la C.D.U.-C.S.U. pour préparer[...]