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HERBLOCK (1909-2001)

Né le 13 octobre 1909 à Chicago dans une famille très sensible au journalisme et au dessin d'humour, Herbert Lawrence Block est sans doute, sous le pseudonyme de Herblock, l'un des dessinateurs de presse politique les plus exceptionnels du xxe siècle. Par la durée de sa carrière, par sa lucidité satirique, son intégrité morale et son courage politique, il incarne l'excellence d'un genre généralement considéré comme mineur. Tout gamin, sa première caricature dessinée à la craie sur la chaussée ne vise pas son maître d'école, mais l'empereur Guillaume II, l'ennemi le plus détesté d'une Première Guerre devenue mondiale avec la participation des États-Unis.

Après un court passage au Lake Forest College (Illinois), où il avait choisi l'anglais et les sciences politiques comme matières principales, il saisit sa chance, en 1929, en reprenant le poste de dessinateur de presse au Chicago Daily News. Sa carrière commence six mois avant l'effondrement des cours de la Bourse qui précipita les États-Unis dans la Grande Dépression. En 1933, il déménage pour Cleveland où lui sont confiés les dessins des éditoriaux de la Newspaper Enterprise Association, offrant une plus large diffusion à ses croquis dans la presse. La crise économique et sociale en Amérique, la montée des fascismes en Europe et les progrès du communisme en Union soviétique sont au cœur des préoccupations de Herbert Block qui soutient la politique du New Deal de Franklin Delano Roosevelt. Après les désillusions consécutives à la Première Guerre mondiale, il lutte contre la tendance isolationniste des États-Unis en montrant la duplicité des dictateurs bientôt impliqués dans l'axe Rome-Berlin-Tōkyō. Ces dessins réalisés au fil de l'année 1941, en contradiction avec les opinions politiques du directeur de la N.E.A., menacent son poste, un péril dont il est heureusement sauvé par l'attribution du prix Pulitzer en 1942. Cette reconnaissance consolide sa réputation de commentateur politique courageux et indépendant. De 1943 à 1945, il produit des dessins et des articles pour l'armée. À partir de 1946, embauché pour le dessin de presse éditorial du Washington Post, il rejoint la capitale où il donnera chaque jour un dessin pendant plus de cinquante ans.

À ce poste, Herblock a toujours fait preuve d'une extrême liberté, jusqu'à soutenir dans ses dessins la contradiction avec le contenu rédactionnel de l'éditorial. Ses contributions portent sur tous les grands combats politiques des États-Unis (les excès de l'anticommunisme – on lui doit le terme de maccarthysme –, la guerre froide, le mouvement des droits civiques, l'opposition à la guerre du Vietnam, le péril nucléaire, le contrôle des armes, la protection de l'environnement, le scandale du Watergate comme ceux de l'époque Clinton, etc.). Plus exceptionnel, aucun des différents présidents d'Amérique de Herbert Hoover à George W. Bush n'a échappé à sa critique sans complaisance. D'ailleurs, Herblock, trois fois lauréat du prix Pulitzer (1942, 1954 et 1979), a partagé une quatrième fois ce prix avec le Washington Post pour la couverture du scandale du Watergate qui conduisit Richard Nixon à la démission. En 1967, le président Lyndon Johnson avait refusé de lui remettre la médaille de la Liberté (medal of Freedom), la plus haute distinction civile décernée pour la première fois à un dessinateur de presse. Elle lui fut enfin attribuée, en 1994, par le président Clinton, autre cible du dessinateur.

Sous des dehors innocents, sa manière graphique dépasse l'illustration anecdotique des problèmes les plus brûlants. Le recours à des métaphores simples et populaires frappe et dénonce les manquements graves des politiques. Cet homme charmant, un peu timide dans la vie, était animé d'un idéal politique sans concession.[...]

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