HERCULANUM
« Herculanum serait une répétition de Pompéi? Vaine demande ! » Par ces mots, Amedeo Maiuri, principal fouilleur de l’une et grand connaisseur de l’autre, cherchait à justifier en 1931 la reprise du dégagement d’Herculanum, commencée quatre ans auparavant. Si le contraste entre les deux villes ne doit plus être aussi fort, des différences subsistent, par-delà la communauté de destin qui les frappa en 79 de notre ère. Herculanum est moins bien connue que Pompéi en dépit d’une histoire des fouilles plus longue. Une grande partie de son tissu urbain, encore situé sous la ville moderne et demeuré partiellement inviolé par les fouilles en tunnel du xviiie siècle, nous échappe, ce qui complexifie d’autant notre perception.
De l’Herculanum préromaine au municipe romain
Selon la légende, Herculanum tirerait son nom de sa fondation par Hercule revenu en Italie après la réalisation de son dixième travail. En fait, la ville pourrait avoir été créée au ive siècle avant notre ère, dans un territoire de langue osque. Nos connaissances sur cette petite cité, accrochée à un promontoire rocheux dominant la mer au pied du Vésuve, restent faibles jusqu’au iie siècle avant notre ère. La trame viaire délimite des îlots quadrangulaires divisés en parcelles régulières selon un axe médian. Les bâtiments publics et l’organisation politique nous échappent complètement. De cette période, seules quelques rares maisons – de la Foulerie, du Papyrus peint selon la nomenclature moderne – ont subsisté. Celles-ci sont organisées selon un plan simple, un long couloir donne accès à une série de pièces disposées sur un seul côté avant de déboucher dans un petit jardin carré. À partir du iie siècle avant notre ère peuvent apparaître des maisons à plan canonique romain, centrées sur un atrium – « maison samnite », « maison à la cloison de bois » –, éventuels vestiges des liens avec Rome qui ne nous apparaissent clairement qu’avec le trauma de la guerre sociale.
De 91 à 89 avant notre ère, Herculanum se range au côté des nombreuses cités italiennes qui se révoltent contre leur ancienne alliée, Rome. La guerre s’achève par un siège dont témoigne Velleius Paterculus: prise par Titus Didius et Minatius Magius, Herculanum est oubliée à la faveur des troubles civils qui agitent Rome pendant les deux tiers du Ier siècle avant notre ère. Il lui faut en effet attendre 38 av. J.-C. pour que deux consuls, Lucius Marcius Philippus et Appius Claudius Pulcher soient mandatés pour transformer la ville samnite en municipe romain.
De cette nouvelle organisation politique, nous ne maîtrisons que les grandes lignes. Deux duumvirs, un édile et un questeur sont attestés, ce dernier sur une des rares affiches de propagande électorale ayant survécu aux destructions engendrées par l’éruption du Vésuve puis par le dégagement du site en tunnels. De l’activité de ces magistrats, on n’a conservé qu’une interdiction de dépôt d’ordures au pied d’un château secondaire, rédigée par l’édile.
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Écrit par
- Nicolas MONTEIX : maître de conférences à l'université de Rouen, ancien élève de l'École française de Rome
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