HERCYNIENS MASSIFS ou MASSIFS VARISQUES
Les faisceaux plissés nés de l'orogenèse alpine forment en Europe des chaînes de montagnes aux sens structural et morphologique. Cette continuité, cette unité de relief et d'affleurement, se retrouvent en plus usé, en plus émoussé, mais aussi en plus vaste, dans la chaîne calédonienne scandinave et l'Oural. Rien de tel pour l'édifice orogénique varisque (ou hercynien) d'Europe occidentale. À ne considérer que la géographie physique, il n'y a pas de « chaîne » hercynienne : il n'y a que des « massifs » hercyniens. Chacun pour son compte, ils émergent de la couverture secondaire et tertiaire en rendant difficile toute reconstitution exacte du plan d'ensemble. Ce que ces massifs peuvent avoir actuellement de relief ne doit du reste rien au soulèvement orogénique initial. Dès la fin des temps primaires, tout était arasé, aplani, nivelé. Un même gondolement épirogénique lent et persistant, encore en cours aujourd'hui, a bombé tardivement les massifs et creusé les bassins sédimentaires qui les séparent. Le modelé en découle : pénéplaines exhumées, gradins d'érosion et monadnocks, reliefs résiduels arrondis, gorges où la vive attaque quaternaire a buriné en creux un relief rocheux jeune, s'accompagnant quelquefois d'un début de sculpture appalachienne généralisée, aux dépens des plateaux limitrophes.
Le tableau, assez négatif, serait incomplet si l'on ne rappelait que, dans le sud et le sud-est de l'Europe, le bâti varisque a été bouleversé par l'orogenèse alpine, qui s'y est superposée, et n'est plus identifiable que sous forme de noyaux ou de fragments plus ou moins remaniés jusque dans leur substance (la zone axiale pyrénéenne constituant cependant un cas privilégié). Il faut de plus avouer notre relative ignorance de ce qui est actuellement le tout proche Atlantique (bien qu'il ne manque pas de solutions hypothétiques, faisant intervenir des boucles, des rotations et des coulissements de compartiments).
On notera enfin que la seule région où le bâti varisque affleure sur une étendue un peu vaste et continue, à savoir la Meseta ibérique, demeura longtemps l'une des plus fragmentairement analysées.
Ce qui précède explique et justifie l'accent mis traditionnellement sur la notion de massifs hercyniens, étudiés nécessairement en ordre dispersé.
Ambiguïté du terme « hercynien »
Le vocable « hercynien » est la transposition française de l'adjectif allemand herzynisch, créé au début du xixe siècle par Leopold von Buch dans un sens bien précis, trop souvent méconnu en France. Dans un contexte faisant jouer, à tort ou à raison, un rôle capital à l'aspect directionnel des structures, il s'agissait de qualifier la direction d'allongement du môle du Harz, et en général de tout relief ou accident tectonique ayant cette même direction ouest-nord-ouest - est-sud-est, quel que soit son âge. Or le Harz, ainsi défini par son contour enveloppe, est un horst issu de la « tectonique saxonne », mésozoïque et tertiaire, essentiellement cassante et radiale, presque sans aucun rapport avec les plis et les structures internes des compartiments. Il est regrettable que Marcel Bertrand ait introduit en France le terme d'orogenèse et de chaîne « hercyniennes » pour désigner ce qu'Eduard Suess avait clairement défini du nom de varisque, c'est-à-dire l'ensemble des déformations survenues au Paléozoïque supérieur (plus exactement du Dévonien moyen au Permien inclus). Il existe en Allemagne une phase tectonique dite « subhercynienne », mais elle désigne des mouvements intrasénoniens localisés notamment, avec forte discordance angulaire, en contrebas et au nord - nord-est du Harz.
Les massifs hercyniens d' Europe centre-occidentale ont joué un rôle capital dans l'histoire en tant que[...]
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Écrit par
- François ELLENBERGER : professeur émérite à l'université de Paris-Sud
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