HERMIONE, frégate
L’Hermione du siècle des Lumières
Cette Hermione du xviiie siècle appartient à une série de six frégates mises en chantier à l’arsenal de Rochefort en 1777-1778, sur les plans de deux frères ingénieurs-constructeurs navals : Henri,dit Chevillard l'Aîné, et Jean-Denis Chevillard. Le plan de Henri Chevillard donne naissance à la Concorde, la Courageuse, l’Hermione et la Fée. Une frégate est un petit navire, de quatrième ou cinquième rang, qui ne participe pas à la ligne de bataille, à la différence des vaisseaux des trois premiers rangs armés de canons de gros calibre. Les frégates, plus manœuvrables car de plus petite taille que les vaisseaux, effectuent des missions de reconnaissance ou de liaison, escortent des navires marchands, chassent les corsaires et attaquent également les navires de commerce des nations adverses. Comme les autres bateaux de cette série, cette frégate est dite « de douze », faisant référence au calibre de ses vingt-six canons tirant des boulets de douze livres et disposés en batterie sur ses flancs. Ces canons sont complétés par huit autres de six livres disposés sur ses gaillards (parties surélevées placées au-dessus du pont supérieur). Sa coque mesure 44,20 mètres de longueur pour 11,21 mètres de largeur et 5,68 mètres de profondeur. Elle est équipée de trois mâts gréés par des voiles carrées, le plus grand mât faisant 56,50 mètres de hauteur. Ce navire embarque trois cents hommes, dont deux cents pour la manœuvre.
Mise en chantier en décembre 1778, l’Hermione est lancée le 28 avril de l’année suivante. Elle est placée sous le commandement d’un officier de Marine qui, à trente-trois ans, compte déjà vingt années de service des armes et de la mer : Louis-René-Madeleine de La Touche (1745-1804), qui passera à la postérité sous le nom de Latouche-Tréville. Dès le mois de mai 1779, la première campagne révèle les qualités de ce bâtiment, rapide et évolutif. Après une brève mission d’accompagnement de trois vaisseaux dans les parages de Belle-Île, La Touche s’empare de deux corsaires britanniques, puis, à l’automne, de trois navires de commerce. De retour à Rochefort pour faire doubler sa coque d’un millier de feuilles de cuivre (afin de la protéger des tarets, redoutables mollusques dévoreurs de bois immergés), la frégate se tient prête pour une « mission particulière » révélée en mars 1780 : il s’agit de conduire outre-Atlantique le jeune marquis de La Fayette (1757-1834) qui s’est déjà rendu célèbre en apportant, à dix-neuf ans, son soutien aux insurgents des colonies américaines en révolte contre la métropole britannique. Cette première expédition de 1777-1778 a précédé l’alliance officielle avec la France. Deux ans plus tard, prenant place à bord de l’Hermione avec sa suite (cinq officiers, son secrétaire et huit domestiques), le marquis de La Fayette est chargé d’annoncer officiellement à George Washington l’arrivée prochaine d’une flotte française de six vaisseaux de ligne et d’une troupe d’infanterie de cinq mille hommes. Le 30 avril 1780, il débarque à Boston sous les ovations, au terme d’une traversée de trente-huit jours. Sous le commandement de La Touche, l’Hermione poursuit alors sa campagne américaine, employée d’abord au service du Massachusetts à la défense des ports et des côtes, et à l’attaque de navires anglais, puis au sein de l’escadre française. En mai de la même année, à Boston, elle accueille à son bord les notables du Massachusetts et, en avril 1781, à Philadelphie, les membres du Congrès américain. Après un affrontement avec cinq navires de guerre anglais devant Louisbourg en juillet 1781 et une participation aux mouvements qui accompagnent la bataille navale décisive de la baie de la Chesapeake en septembre, la frégate est de retour à Rochefort en février 1782, avant de partir vers d’autres horizons. En 1793, alors[...]
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Écrit par
- Denis-Michel BOËLL : conservateur général du patrimoine
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Médias