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GUIBERT HERVÉ (1955-1991)

Hervé Guibert - crédits : Ulf Andersen/ Getty Images

Hervé Guibert

Chez Hervé Guibert — qui fut longtemps critique photographique au journal Le Monde —, l'écrivain produit des images ou des fantasmes, et le photographe raconte des histoires. Dans L'Image fantôme (1981), il avait clairement exprimé que la photographie telle qu'il l'entendait ne se concevait que dans une visée autobiographique. C'est ce dont témoigneront ses livres de photographies : Le Seul Visage (1984), L'Image de soi, ou l'Injonction de son beau moment ? (1989). Les nombreux livres d'Hervé Guibert peuvent se regrouper en grandes sections, où se retrouvent les mêmes obsessions et, souvent, les mêmes personnages, dont l'auteur lui-même, omniprésent : on distinguera les textes à caractère pornographique (Les Chiens, 1982, Les Aventures singulières, 1982, Vous m'avez fait former des fantômes, 1987), les romans « familiaux » ou directement autobiographiques (Suzanne et Louise, 1980 ; Mes parents, 1986 ; À l'ami qui ne m'a pas sauvé la vie, 1990 ; Le Protocole compassionnel, 1991 ; L'Homme au chapeau rouge et Cytomégalovirus, 1992), des livres inspirés d'expériences « professionnelles » (Des aveugles, 1985 ; L'Incognito, 1989), enfin des romans plus atypiques, souvent drolatiques (Voyage avec deux enfants, 1982 ; Les Lubies d'Arthur, 1983 ; Mauve le Vierge, 1988 ; Les Gangsters, 1988 ; Fou de Vincent, 1989 ; Mon valet et moi, 1991).

Dès son premier texte, La Mort propagande (1977), Hervé Guibert affirmait : « Mon corps est un laboratoire que j'offre en exhibition, l'unique acteur, l'unique instrument ». Guibert a trouvé, involontairement, le lieu d'accomplissement de son projet d'écrivain : dire la vérité, même si elle se confond avec la mort. « Le sida m'a rendu intelligent », notait Guibert, mi-sérieux, mi-ironique. C'est l'intelligence, en effet, de ces livres qu'on doit retenir. On rappellera enfin le scénario qu'Hervé Guibert avait écrit avec Patrice Chéreau, L'Homme blessé (1983), où un coup de foudre entre deux garçons était envisagé par les auteurs « comme une initiation au malheur ». Écrire, Guibert l'a souvent dit, c'est trahir : ses amis, ses idéaux, ses maîtres. Il reconnaissait volontiers que ses livres étaient écrits sous l'influence de, ou plutôt en compagnie des écrivains qu'il admirait : Roland Barthes, Peter Handke, Eugène Savitzkaya, Knut Hamsun ou encore Thomas Bernhard pour À l'ami qui ne m'a pas sauvé la vie.

— François POIRIÉ

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